Benvenuto Cellini au Nationale Opera d'Amsterdam

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Etrénnée à l'English National Opera la saison dernière – avant d'être présentée la saison prochaine au Liceu de Barcelone et ultérieurement à l'Opéra National de Paris -, cette production de Benvenuto Cellini de Hector Berlioz - confiée aux bons soins de Terry Gilliam – fait actuellement les beaux soirs du Nationale Opera d'Amsterdam. Car l'ex-membre des Monthy-Python parvient rien moins qu'à restituer à l'ouvrage son intégrité, sa puissance et sa beauté. Si on peut émettre des réserves quant au choix d'avoir fait de Benvenuto Cellini un opéra-comique selon la conception originelle imaginée – mais jamais réalisée – par Berlioz, il faut reconnaître que la drôlerie, la vie tourbillonnante, mais aussi le panache du spectacle répondent tout à fait à l'esprit comédie, tantôt burlesque, tantôt héroïque, qui est celui de l'ouvrage. On se souviendra longtemps de l'arrivée colorée et chaotique, par l'arrière de la salle, pendant l'Ouverture, d'une troupe de comédiens, jongleurs, danseurs, acrobates qui investit l'auditorium noyé sous une pluie de confettis – avant de réapparaître pendant la fameuse scène du Carnaval romain, à la fin du I. Inoubliable, également, l'arrivée du Pape dans l'atelier de Cellini, tel un Deus ex machina, monté sur un trône à roulette et flanqué de centurions romains. Avec son visage outrageusement grimé et ses ongles extravagamment longs, il fait immanquablement penser à Altoum dans Turandot !

Le ténor américain John Osborn est un Cellini flamboyant. Sa fréquentation du répertoire belcantiste et celle de rôles plus lyriques (comme récemment Des Grieux à Lausanne ou encore Hoffmann à Lyon) lui ont permis de donner toute sa crédibilité vocale à un rôle inhumain. Il a distillé son grand air « Sur les monts » avec un sens des nuances et du phrasé que l'on entend rarement chez Berlioz : il est le grand triomphateur de la soirée. Pour Patricia Petibon initialement annoncée, la jeune soprano italienne Mariangela Sicilia se montre vocalement à l'aise dans le rôle de Teresa, personnage dont elle ne fait pas une mijaurée mais une jeune fille espiègle et déterminée. Elle aborde l'air « Entre l'amour et le devoir » avec une vraie mélancolie et une lumière diffuse dans le timbre, mais la prononciation de notre langue demeure en revanche vraiment perfectible.

On adressera le même bémol au chant du baryton italien Maurizio Muraro, Balducci au demeurant parfait de faconde comme d'autorité. La mezzo canadienne Michèle Losier est un excellent Ascanio, avec un timbre rond, une diction claire et un entrain irrésistible dans ses deux airs. Habitué du rôle, Laurent Naouri fait de Fieramosca un personnage essentiel de l'œuvre et non un comparse, jouant sans complexe la carte du grotesque. Seul la basse bulgare Orlin Anastassov, dépourvu du timbre, de la diction et de la majesté sonore qu'exige le rôle du pape, s'investit en retrait de cette distribution.

Enfin, le grand chef anglais Sir Mark Elder réussit à électriser les forces vives de l'Orchestre Philharmonique de Rotterdam et du Chœur du Nationale Opera, faisant de ce Benvenuto Cellini l'un des plus passionnants qu'on puisse imaginer.

Emmanuel Andrieu

Benvenuto Cellini au Nationale Opera d'Amsterdam, jusqu'au 31 mai 2015

Crédit photographique © Matthias Baus

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