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Suite au changement de direction à la tête du Kennedy Center, les artistes doivent-ils continuer de s’y produire ? Certains annulent leurs engagements. D’autres revendiquent de les maintenir pour y porter leurs idées. C'est le cas de la soprano américaine Karen Slack.
En cas de désaccord politique, faut-il partir pour boycotter ou rester pour résister ? Il n’y a sans doute pas de réponse catégorique, mais la question se pose actuellement aux artistes américains qui doivent se produire prochainement au Kennedy Center de Washington. On l’évoquait récemment, sa directrice Deborah Rutter a été limogée de façon inédite dans l’histoire de l’institution par l’administration Trump, qui entend dorénavant y appliquer sa propore « vision d’un âge d’or des arts et de la culture ».
En guise de protestation, certains artistes se désolidarisent du Kennedy Center. Renée Fleming et le musicien Ben Folds ont démissionné de leurs fonctions de conseillers artistiques, tout comme la productrice Shonda Rhimes au sein du Conseil (en citant John F. Kennedy : « Si l'art doit nourrir les racines de notre culture, la société doit laisser l'artiste libre de suivre sa vision là où elle le mène »). Certains artistes qui devaient se produire sur la scène du Kennedy Center annulent également leurs engagements : c’est le cas de la comédienne et autrice Issa Rae (son spectacle affichait complet), du groupe de rock Low Cut Connie, ou de l’autrice Louise Penny qui devait lancer son prochain livre au Kennedy Center.
Si le spectacle devait être annulé « ce ne sera pas parce que j'ai décidé d'abandonner ! »
D’autres font néanmoins un choix différent, comme la soprano américaine Karen Slack – récemment récompensée du Grammy Awards 2025 du Meilleur album lyrique solo. La soprano doit se produire au Kennedy Center début mars prochain dans le cadre des Ruth Bader Ginsburg Memorial Recitals – une série de récitals organisés ponctuellement au Kennedy Center en hommage à Ruth Bader Ginsburg, cette figure du droit des femmes aux Etats-Unis et ancienne juge de la Cour Suprême.
Au Kennedy Center, Karen Slack doit donner son récital African Queens, inspiré des figures de sept grandes reines africaines historiques, mais méconnues en Occident, au travers d’airs traditionnels et d’œuvres inédites de compositeurs contemporains. Sur les réseaux sociaux, la soprano précise qu’elle n’annulera pas son récital et s'en explique : « Comment pourrais-je prétendre chanter sur des femmes puissantes qui ont lutté contre l'oppression, dans le cadre d'un récital portant le nom de Ruth Bader Ginsberg et dans une institution aussi estimée que le Kennedy Center, si je m'en allais comme ça ? Nous verrons comment cela se déroulera, MAIS (si le spectacle devait être annulé) ce ne sera pas parce que j'ai décidé d'abandonner ! »
Il faut dire que certains spectacles initialement prévus au Kennedy Center ont déjà été annulés par le nouveau conseil d’administration, comme la comédie musicale pour enfant Finn, la veille de la première – annulation que le (nouveau) Kennedy Center justifie par des motivations « purement financières ».
Dans ce contexte, l’ancienne directrice du Kennedy Center Deborah Rutter a été interrogée par la presse américaine sur la question qui se pose aux artistes. Doivent-ils continuer ou non à se produire dans sur la scène de la salle de Washington ? Elle répond en ces termes : « s’ils ont une invitation et qu’ils ont la garantie de pouvoir exprimer leurs idées et leur art en toute sécurité pour eux, absolument ! Notre centre culturel national a besoin et mérite d’être une plateforme pour les artistes de tous horizons. Mais ils doivent être les bienvenus et s’y sentir en sécurité ».
publié le 18 février 2025 à 08h35 par Aurelien Pfeffer
18 février 2025 | Imprimer
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