En février 2025, Massimo Biscardi prendra officiellement ses fonctions de nouveau président et surintendant de l’Académie Santa Cecilia, l'une des plus anciennes institutions musicales du monde, fondée officiellement en 1585.
Elle a depuis évolué au fil des siècles, passant d'une organisation de musiciens essentiellement « locaux » à une académie moderne et à une organisation de concerts symphoniques de renommée internationale. Réunissant un corps académique de 100 des plus illustres représentants de la culture et de la musique avec un orchestre symphonique et un chœur parmi les plus réputés au niveau international, l'Académie dispense une formation musicale professionnelle et conserve un patrimoine historique extrêmement riche, reflétant ainsi sa propre histoire pluriséculaire.
Histoire de l’Académie durant son premier siècle d'existence : 1585-1685
En mai 1585, le pape Sixte V publie la bulle « Ratione congruit », acte de fondation officielle de la Congrégation des musiciens sous l’invocation de la Bienheureuse Vierge Marie, saint Grégoire et sainte Cécile. Son premier siège fut l’église Santa Maria ad Martires, plus connue sous le nom de Panthéon, avant de changer successivement de siège ecclésiastique à six reprises.
Lancée comme une association professionnelle, avec des objectifs à la fois artistiques et caritatifs, la Congrégation se trouva bientôt opposée aux chantres de la Sixtine, l'autre organisation musicale importante de la Rome papale ; la discorde perdura jusqu'à la fin du règne pontifical. Les dissensions furent si vives qu'elles aboutirent à la Breve de 1624 du pape Urbain VIII, par laquelle le pontife cédait aux Céciles le contrôle de la profession, de l'enseignement et de l'édition de la musique à Rome. Cette Breve fut révoquée deux ans plus tard sous la pression de la congrégation Sixtine, mais la plupart de ces privilèges furent reconfirmés par la Breve de 1684 du pape Innocent XI.
Enfin, en 1685, la Congrégation établit son propre siège à San Carlo ai Catinari, où la chapelle baroque de Santa Cecilia et son oratorio attenant furent le théâtre de réunions secrètes, d'assemblées générales et de splendides fêtes musicales jusqu'en 1848. La Congrégation, subdivisée en trois catégories professionnelles de maître de chapelle, d'instrumentiste et de chanteur, se soumit dès le début à une organisation hiérarchique rigide. Le chef était le cardinal protettore (président d'honneur), puis le cardinal primicerio (président effectif), tous deux hauts prélats de la curie, auxquels succédèrent les postes de gardien, trésorier, secrétaire, conseiller, organisateur des fêtes, visiteur des prisonniers, membres du conseil sacristial et infirmières - tous élus par les membres.
Une période particulièrement faste se déroule sous la protection du cardinal Pietro Ottoboni (1691-1739). Le Breve du pape Innocent XI de 1716 oblige tous les musiciens travaillant à Rome à s’inscrire comme associés de Sainte-Cécile. Un autre événement digne d’intérêt est la nomination en 1774 de la première femme associée, la compositrice Maria Rosa Coccia.
Vers la fin du siècle, une nouvelle Breve pontificale signée par Pie VI en 1794 ratifie une fois de plus les privilèges des associés de Sainte-Cécile, confirmant ainsi leur fidélité à la papauté pendant l’une des périodes les plus difficiles de l’État pontifical, affecté par les vents révolutionnaires qui soufflaient en Europe. Le Congrégation connait ensuite une pause de 1797 à 1822 lorsqu’elle reprend son activité régulière.
De la Congrégation à l'Académie pontificale : 1830-1870
L'élection de Luigi Rossi au poste de secrétaire de la Congrégation en 1830 inaugure une période de grands changements, qui consolide l'Académie comme une institution de véritable envergure internationale. Avec la décision d'ouvrir l'adhésion à des catégories jusqu'alors exclues (poètes, danseurs, musicologues-philologues, facteurs d'instruments de musique, éditeurs, et même souverains et ambassadeurs en qualité de mécènes) et grâce à la collaboration de Gaspare Spontini, Rossi lance une profonde réforme des Statuts, transformant la Congrégation d'abord en Congrégation et Académie (1838) puis en Académie pontificale. Tous les principaux représentants du monde musical européen de l'époque étaient inscrits comme associés honoraires.
Parallèlement à toutes ces innovations, l'Académie continua à faire face aux problèmes habituels : la rivalité avec les chantres pontificaux et, à partir de 1824, avec l'Académie philharmonique romaine ; ou encore la recherche incessante d'un siège, fut établi au Palazzo Camerale, via di Ripetta, en 1853. Mais certains problèmes de longue date furent affrontés avec un esprit nouveau : l'enseignement musical, par exemple, en jetant les bases de l'institution d'une école de musique ; ou l'assistance aux membres, pour lesquels une Instituzione di Beneficenze ou « institution de bienfaisance » fut créée auprès de la Cassa di Risparmio de Rome.
L’évolution de l’Académie jusqu’à aujourd’hui
En quelques années, l’Académie a connu d’autres changements profonds, impulsés par le soutien du gouvernement de Savoie et par la présidence d’Enrico di San Martino. Au fur et à mesure que les saisons de concerts se développaient et se consolidaient, avec des ensembles artistiques stables et un grand nombre d'abonnés, l'Académie a fini par assumer un aspect unique pour son genre, qu'elle conserve encore aujourd'hui même après avoir rompu les liens avec de nombreuses entités et écoles qui ont été fondées en même temps qu'elle.
Après la Seconde Guerre mondiale, l’Académie – devenue Nationale – a commencé une nouvelle période. Une salle de concerts – le problème dominant – a été provisoirement aménagée au Théâtre Argentina (1946-1958), tandis que l’Académie attendait le résultat d’un concours d’architecture (1952-1954) qui devait résoudre ce dilemme récurrent. Lorsque le concours a échoué, l’Auditorio Pio de la Via della Concilazione est devenu salle d’accueil pour la saison 1958-1959, et ce jusqu’à la fin du siècle. En 1967, la Legge 800 (loi de réforme des arts du spectacle) a institué la Gestion autonome des concerts de l’Académie nationale de Santa Cecilia, un organisme public chargé d’organiser et de gérer les saisons de concerts, reconnaissant également la position particulière de l’Académie dans la divulgation et la diffusion de la culture musicale sous toutes ses formes (concerts, conférences, publications, conservation du patrimoine historique et enseignement musical supérieur). L’Académie et la Gestion autonome sont présidées par le même président (qui est également surintendant et directeur artistique), élu par les académiciens parmi leurs propres rangs.
C’est justement à ce poste que vient d’être nommé le maestro Massimo Biscardi.
Nomination de Massimo Biscardi
Né à Monopoli en 1955, il est diplômé en piano, composition et direction d'orchestre. Il a travaillé quelques années comme pianiste de concert et professeur, avant de se consacrer exclusivement à l'organisation musicale.
Il s'est d’ailleurs produit en tant que pianiste et chef d'orchestre avec l'Académie nationale de Santa Cecilia, le Teatro Colòn de Buenos Aires, les Arènes de Vérone, le Teatro Massimo di Palermo, le Teatro di San Carlo et l'Orchestre Alessandro Scarlatti de Naples. De 1992 à 2010, il a été directeur artistique du Teatro Lirico di Cagliari et de 2012 à 2014, consultant artistique de l'Orchestre Mozart. En 2014, il est devenu surintendant et directeur artistique de la Fondazione Teatro Petruzzelli di Bari qui connaît sous sa gouvernance un important développement artistique. Il a également reçu le Prix Abbiati en 2001.
Il a reçu le Prix Abbiati en 2001 et a été élu académicien à part entière de l'Accademia Nazionale di Santa Cecilia.
Aujourd’hui, il est nommé président et surintendant de l’Académie Santa Cecilia après avoir obtenu les 2/3 des voix nécessaires lors du vote du conseil d'administration de l'organisation.
publié le 6 novembre 2024 à 08h54 par Elodie Martinez
06 novembre 2024 | Imprimer
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