Du 7 au 9 janvier dernier, l’Orchestre et les Chœurs du Mariinsky de Saint-Pétersbourg se produisaient en France, à Toulouse et Paris. Depuis l’ambassade de Russie à Paris, le chef Valery Gergiev en profitait pour présenter à la presse le Mariinsky II, la seconde scène de l’établissement saint-pétersbourgeois, qui sera inaugurée début mai prochain.
« Comme Bastille complète Garnier à Paris », le Mariinsky II s’inscrit dans la continuité du Théâtre Mariinsky de 1860 (l’ex-Kirov de l’ère soviétique) et de son auditorium achevé en 2007 pour former « l’un des plus grands complexes culturels au monde dédié à la musique classique, l’opéra et le ballet ».
Le projet était initié voici une dizaine d’années, en 2003 avec un appel à projets initialement remporté par l’architecte français Dominique Perrault. Son projet, ambitieux (voire peut-être un peu trop) prenant la forme d’un « cocon doré », sera néanmoins retoqué en 2008 car jugé trop onéreux, trop peu intégré à l’architecture saint-pétersbourgeoise et trop complexe à entretenir. La réalisation du Mariinsky II sera alors confiée aux bons soins du cabinet canadien Diamond Schmitt Architects qui proposera un bâtiment qui « s’inscrit dans l’héritage de l’architecture historique de la capitale russe, mais empreint de modernité » : une base de pierres, des façades de verre et des baies vitrées donnant à voir le Théâtre Mariinsky historique et dévoilant une vue panoramique sur la ville, surmonté d’un amphithéâtre sur le toit animé par un auvent de verre (il accueillera notamment les temps forts du Festival des Nuits Blanches de Saint-Pétersbourg).
Et aujourd’hui, la « première maison d’opéra d’envergure construite en Russie depuis les Tzars », qui se veut « le projet architectural le plus ambitieux de Russie depuis 70 ans » selon son concepteur, revendique d’imposantes mensurations : une salle d’une capacité de 2000 places, une superficie de 79 114 m² (accueillant foyer et salles de répétitions), pour un budget – dit-on – de quelque 22 milliards de roubles (545 millions d’euros) « intégralement pris en charge par le gouvernement russe » vers qui va toute la gratitude de Valery Gergiev.
Mais les mélomanes retiendront sans doute plus volontiers les capacités scéniques et acoustiques de la nouvelle salle : sous la houlette des acousticiens allemands de Müller‐BBM, la scène et la fosse sont modulables pour accueillir concerts et opéras (la fosse peut être couverte ou agrandie selon les besoins de l’orchestre), faciliter l’alternance de plusieurs productions ou encore permettre les captations et enregistrements dont on sait le Mariinsky friand. La vaste arrière-scène doit en outre autoriser des changements de décors nombreux, des plus classiques aux plus modernes – car parallèlement aux installations technologiques permettant de concrétiser « les projets les plus exigeants des metteurs en scènes », une passerelle enjambant le canal Kryukov et reliant les deux Mariinsky (un « défi technologique » selon l’architecte Jack Diamond) permet de transférer les décors d’un établissement à l’autre.
Après une dizaine d’années de conception, le Marrinsky II ouvrira officiellement ses portes au public saint-pétersbourgeois tout au long de trois journées d’inauguration début mai 2013 : d’abord avec un gala le 2 mai (où l’on attend les plus grandes voix russes actuelles, souvent révélées par Valéry Gergiev, parmi lesquelles Anna Netrebko, Olga Borodina ou encore le sulfureux Evgeny Nikitin - mais aussi Plácido Domingo), un ballet le 3 mai (Jewels, d'après une chorégraphie de George Balanchine), et d'un opéra le 4 mai (Nabucco, où l’on retrouverait Placido Domingo et Maria Gulegina dans la distribution), suivi de la vingt-et-unième édition du Festival des Nuits Blanches de Saint-Pétersbourg du 24 mai au 14 juillet (dont les manifestations seront données dans le triple établissement, le Théâtre Marrinsky, le Mariinsky et l’auditorium Marrinsky, et qui sera notamment l’occasion de découvrir le nouvel opéra de Rodion Shchedrin commandé par l'établissement).
Les festivités commémoreront quoiqu’il en soit le quart de siècle de Valery Gergiev à la tête du Mariinsky (et le soixantième anniversaire du Chef), faisant passer l’établissement russe « de l’ère soviétique au XXIème siècle [...] pour l’ouvrir sur le monde et lui permettre de demeurer l’une des institutions les plus vivantes dans le domaine des arts de la scène ». Une évolution que le maestro place résolument sous le signe de la jeunesse et de la transmission, de la place faite aux futures générations (que ce soit en ouvrant la scène du Marrinsky aux compositeurs d’aujourd’hui ou la salle au jeune public). De quoi peut-être aussi préparer la relève du très actif et prolifique Valery Gergiev, à l’emploi du temps déjà particulièrement chargé entre la direction générale et artistique du Théâtre Mariinsky, le rôle de chef principal de l’Orchestre Symphonique de Londres (auxquels pourrait s’ajouter celui du Philarmonique de Munich à partir de 2015), la direction artistique du Festival des Nuits Blanches de Saint-Pétersbourg ou encore la présidence de l’emblématique Concours International Tchaïkovski.
18 janvier 2013 | Imprimer
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