En 2017, l'Opéra de Lyon et le Théâtre des Champs-Elysées imaginaient un cycle commun de productions concertantes visant à explorer les ouvrages de jeunesse de Verdi. Ce triptyque débutait avec Attila en 2017, se poursuivait l'an passé avec Nabucco, et se concluait cette année avec Ernani, d'après l'oeuvre de Victor Hugo – donné le 6 novembre à Lyon, puis le 8 à Paris.
Très attendu dans le rôle-titre, le ténor italien Francesco Meli débute la soirée avec un chant particulièrement puissant, et peut-être même trop au regard de la salle. Il s'adapte néanmoins rapidement à l'acousitique du lieu et cet excès de décibels est le seul bémol de son interprétation. Il maîtrise le rôle de bout en bout, déployant un timbre lumineux et solaire, voire incandescent, souligné par un phrasé exemplaire. Et au terme de la soirée, le public le gratifie d'une salve d'applaudissements mérités. Face à lui, nous retrouvions Amartuvshin Enkhbat que nous avions déjà entendu en Nabucco dans la production de l'an passé, en remplacement de Leo Nucci. Il renouvelle ici l'enthousiasme d'alors, avec une voix de baryton chatoyante et voluptueuse, épousant la partition d'un timbre royal. Il incarne le roi à merveille, faisant montre de toute sa puissance, à la fois personnelle et politique, tant dans sa fureur que dans sa clémence. Son air de l'acte III enflamme et envoûte le public, qui lui réservera une ovation, démontrant toute l'intériorité du personnage. Quant au Silva de Roberto Tagliavini, il convainc tout autant que ses deux confrères dans ce rôle de vieillard grâce à une projection noble et soyeuse, conférant ombre et lumière au personnage qu'il sert de tout son talent et d'un souffle à toute épreuve. Carmen Giannattasio, qui incarne l'Elvira tant convoitée par tous, peine parfois à émouvoir malgré une incarnation manifestement sincère. On pourrait aussi regretter que les graves soient parfois happés par l'orchestre, et peinent à se faire entendre, sans que la faute n'en revienne aux musiciens... Enfin, Margot Genet (Giovanna), Kaëlig Boché (Don Riccardo) et Matthew Buswell (Jago) complètent la distribution en lui faisant honneur.
Autre grand triomphateur de la soirée, le chef Daniele Rustioni est à la tête de l'Orchestre de l'Opéra de Lyon – en grande forme –et démontre, une fois encore, tout son talent. La partition de Verdi n'a plus de secret pour lui. Il parvient à l'enjoliver d'une multitude de couleurs et de nuances, faisant entendre tantôt la révolte, tantôt la dimension politique mais aussi privée de cette terrible tragédie. Il met en valeur non seulement la musique mais aussi les voix. Le chef parvient en effet à jouer avec les différents aspects de l'oeuvre pour mieux les magnifier, tout en restant à l'écoute de chacun, modulant les excès sans jamais perdre de vue le moindre détail ou la globalité de ce qui se joue. Enfin, le Choeur de l'Opéra, préparé par Johannes Knecht, brille de mille feux en montrant son unité exemplaire et un ensemble d'une excellence dont la renommée n'est plus à faire.
Finalement, l'Opéra de Lyon et le Théâtre des Champs-Elysée (ainsi que l'Auditorium de Lyon) prouvent une fois encore que leur partenariat est décidément une source constante de réjouissance !
11 novembre 2019 | Imprimer
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