Dans le cadre de son édition 2013, le Festival de printemps de Salzbourg s’articulait autour de la notion de « sacrifice ». Sous la direction artistique de l’envoutante cantatrice italienne Cecilia Bartoli, le festival offrait cette année un mélange coloré d’opéras, de ballets, de concert et de chœurs qui semblaient se répondre mutuellement. En point d’orgue, Norma de Vincenzo Bellini est l’opéra retenu dans le cadre du Festival de printemps et qui est redonné à Salzbourg au cours du Festival d’été, avec Cecilia Bartoli dans le rôle-titre.
De prime abord, on pourrait penser que la voie de la cantatrice n’est pas parfaitement adaptée à cet exercice de bel canto ou aux arias expressifs de l’œuvre. Mais forte de son expérience, elle sait comment colorer son interprétation, l’emplir de chaleur en évitant les vibratos ou la surenchère dramatique.
Mêlant une présence colossale sur scène matinée d’un jeu tout en émotion, Norma semble ici souffrir viscéralement et lutter éperdument pour son amour. Elle assume néanmoins pleinement son échec et prend toutes ses responsabilités.
Et notamment après l’entracte, le public est invité à poursuivre une soirée à la fois convaincante et passionnante. John Osborn dans le rôle de Pollione dévoile une belle voix chaude au timbre italien. Et si son jeu d’acteur nécessiterait sans doute un peu plus de vie, cette Norma rend sa prise de décision difficile et sa souffrance est convaincante. Adalgisa était interprétée par la jeune mexicaine Rebeca Olvera. Sa tessiture mezzo est lumineuse, à la hauteur de sa facilité, même si son interprétation manque parfois de couleurs.
Mais les réels architectes de cette soirée enthousiasmante sont sans doute les metteurs en scène Moshe Leiser et Patrice Caurier. Ils transposent l’histoire de Norma dans la France occupée par la Wehrmacht allemande. L’œuvre se déroule ici dans une école de campagne où se sont réfugiés des résistants français. Leur réinterprétation de l’œuvre, les décors et la mise en scène sont intelligents, réalistes et parfaitement équilibrés. La scène est régulièrement en mouvement, mais toujours avec mesure et sans exagération. Les mouvements de foules restent circonscrits au fond de la scène, tout en discrétion. On reste donc pleinement concentré sur Norma, Adalgisa et Pollione.
Giovanni Antonini dirige l’orchestre La Scintilla qui utilise des instruments originaux d’époque. C’était une décision qui de prime abord laissait circonspect, mais offrant finalement une nouvelle expérience sonore particulièrement intéressante. Fort d’un tempo rapide, très brut dans ses intonations, nous avons entendu du Bellini libéré des contraintes orchestrales romantiques, se faisant clair, transparent et rafraichissant.
L’édition 2014 du Festival sera consacré à Rossini, avec les opéras Cenerentola et Otello, le Stabat Mater et la Petite Messe Solennelle du maître. Cette année, la Norma est également donnée dans le cadre du Festival d’été de Salzbourg, du 17 au 30 août 2013, et on est enthousiaste à l’idée de la revoir.
Traduction libre de la chronique d'Helmut Pitsch, pour Opéra Online.
Crédit photo : © Hans Jörg Michel
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