Un très plaisant Rake’s Progress à l’Opéra de Rennes

Xl_the_rake_s_progress_opera_de_rennes_1_laurent_guizard © Laurent Guizard

Ce Rake’s Progress de l’Opéra de Rennes est un spectacle très plaisant. La soirée se déroule sans que le spectateur sente le temps passer, grâce à une mise en scène imaginative et une équipe vocale très soudée.


The Rake's Progress, Opéra de Rennes (c) Laurent Guizard

Commençons cependant par des bémols. On se souvient de la mise en scène ténébreuse d’Olivier Py à l’Opéra Garnier en 2012. L’option choisie par Mathieu Bauer (ancien directeur du CDN de Montreuil) est résolument plus joyeuse. Les gags visuels abondent, on retrouve une belle gestion de l’espace (avec de nombreux chanteurs déambulant dans l’espace du théâtre), les personnages sont bien croqués et se meuvent joliment sur scène. Pourtant, la dimension religieuse du livret (il s’agit du parcours d’un débauché) de même que sa profondeur philosophique (Rakewell rencontre son ombre faustienne) sont escamotées. En replaçant l’action au moment de la création de l’ouvrage, Bauer fait appel à l’imaginaire pop des années 50 comme autant de diapositives rigolotes. L’ensemble ne dépasse pas toujours le stade du pastiche.

Pourtant, on s’amuse bien dans ce Rake’s Progress rennais !  La musique d'Igor Stravinsky claque comme un fouet. L’Orchestre de Bretagne sous la direction de Grant Llewellyn impressionne par sa précision rythmique et le mouvement qu’il insuffle sur la scène.


The Rake's Progress, Opéra de Rennes (c) Laurent Guizard

La troupe vocale s’amuse et nous amuse avec un plaisir contagieux. Alissa Anderson est une gouleyante Mother Goose. Malgré des graves défaillants, Aurore Ugolin réussit un irrésistible numéro de Baba la Turque. Scott Wilde brosse un auguste Trulove, Thomas Tatzl déploie une jolie palette pour définir le personnage à la fois séduisant et inquiétant de Nick Shadow.  Excellent comédien, Julien Behr occupe la scène jusqu’à parfois l’envahir. Grand atout du spectacle, le Chœur Mélisme(s) éblouit par ses nuances. Mais l'héroïne de la soirée reste certainement l’Ann Trulove d’Elsa Benoit. La soprano, qui a débuté à Rennes au sein du Chœur Mélisme(s), fait souffler le vent du grand opéra, tout en gardant une délicieuse candeur. Qu’on se le dise, Elsa Benoît est l’une des grandes chanteuses françaises à suivre !

Certes, Mathieu Bauer n’épuise pas la richesse foisonnante du conte de Stravinsky mais la soirée est vive, énergique, revigorante. C’est un plaisir qu’il ne faut pas bouder. Tous à l’Opéra de Rennes !

Laurent Vilarem
Rennes 3 mars 2022

Crédit photos : © Laurent Guizard

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