Acis et Galatée (1718) - petit opéra de Georg Friedrich Haendel créé dans la résidence du Duc de Chandos et souvent rejoué du vivant du compositeur – vient d''être monté (pour une seule représentation) à l'Opéra Grand Avignon, en co-réalisation avec Musique Baroque en Avignon - et en coproduction avec le Centre Lyrique d'Auvergne, l'Opéra de Massy et le Théâtre de Montluçon, où le spectacle sera donné ultérieurement. Nécessitant quatre chanteurs seulement (auquel on a adjoint ici une chanteuse pour incarner le chœur et un comédien pour expliciter l'action avant chaque acte en l'absence de surtitrage), d'une durée assez brève (1h40), le masque de Haendel, d'une grande économie de moyens, mais d'une beauté pénétrante, est ainsi une œuvre idéale pour tourner dans plusieurs théâtres à la suite. Cette pastorale bucolique, tirée des Métamorphoses d’Ovide, narre les amours de la nymphe Galatée et du berger Acis, contrariées par le cyclope Polyphème qui, par jalousie, écrasera mortellement Acis sous un rocher avant que Galatée ne fasse ressusciter son amant sous la forme d’un ruisseau.
Confiée à Anne-Laure Liégeois, ancienne directrice du CDN d'Auvergne, la production transpose l'action à l'époque du compositeur, dans un XVIIIe siècle galant. La scénographie conçue par la metteure en scène elle-même – un carré de gazon encerclé d'un miroir d'eau – s'avère aussi simple qu'élégante, et rappelle l'univers d'un Robert Carsen. Cette volonté d'épure élude le superflu en préservant l'essentiel : le récit. Ainsi traitée, l'œuvre n'a aucune peine à livrer sa délicate beauté.
De son coté, le plateau enthousiasme. C'est la Galatée de Katherine Crompton que l’on retiendra en premier lieu. D’une grâce innée, la soprano anglaise captive également par son timbre d’une grande pureté et grâce à l’agilité fort méritante de ses vocalises. Dès son premier air « Ye verdant plains and woody mountains », l’auditoire tombe sous le charme de cette artiste, de son naturel et de sa finesse d’interprétation. Le ténor français Cyril Auvity, dans le rôle d’Acis, lui offre une réplique idéale tant le couple dégage spontanéité et fraîcheur. Doté d'un timbre suave et expressif, il convainc tant dans les moments d’éclats - tel l’air « Love in her eyes sits playing » - que dans ceux plus expressément affectueux ou langoureux. Le Polyphème de la basse britannique Edward Grint n’est pas en reste, avec une voix sonore et une forte présence dramatique, et il se tire avec beaucoup de style et d’émotion de ce rôle de « méchant ». Enfin, le ténor américain Patrick Kilbride – Lauréat du 24ème Concours International de chant de Clermont-Ferrand aux côtés d'Edward Grint – prête à son « Monsieur bons offices » sa voix claire et bien projetée.
Mais il faut surtout saluer la qualité exceptionnelle du Banquet Céleste, ensemble baroque fondé (en 2009) et dirigé par le contre-ténor français Damien Guillon. Pas une seconde, la partition ne lui échappe, et ainsi maître du temps musical, il parvient aisémént à insuffler à sa phalange une vitalité et un désir jouissifs pour l'oreille des auditeurs.
Acis and Galatea de Georg Friedrich Haendel à l'Opéra Grand Avignon – Le 3 octobre 2015
Crédit photographique © Cédric Delestrade
07 octobre 2015 | Imprimer
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