Public des grands soirs au Festival d'été de Lucerne – dans la superbe salle construite par Jean Nouvel au bord du Lac des Quatre cantons (le KKL) – pour la venue de la Staatskapelle de Dresde dirigée par Christian Thieleman – et de la divine soprano Anja Harteros – dans un programme entièrement consacré à Richard Strauss.
Et c'est de l’émotion au delà de toute limite qu'éprouve l'auditoire à l'écoute des sublimes 4 derniers Lieder, chefs-d’œuvre écrits entre 1945 et 1948 par le compositeur allemand sur des poèmes de Josef von Eischendorff et Hermann Hesse. La beauté du timbre moiré de la cantatrice allemande, ses aigus voluptueux et rayonnants - célestes dans le haut du registre - font merveille dans ces pages extraordinaires. Elle délivre notamment un September déchirant de mélancolie et un Im Abendrot bouleversant - comme suspendu dans le temps et l’espace - qui rend pleinement justice à cette évocation du crépuscule de la vie de Strauss. Et quel écrin lui fait la phalange allemande, une des meilleures au monde, dont les cordes soyeuses et les cors d'une superbe rondeur sont un baume pour les oreilles. Après l'ultime Lied, les spectateurs du KKL leur font une fête à tout rompre... après dix secondes d’un silence très « parlant » !
Après l’entracte, l’orchestre s’attaque à la grandiose Symphonie alpestre, le dernier poème symphonique de Strauss, dédié à la magnificence des Alpes, ainsi qu’à la beauté et à la grandeur de la Nature. Composé entre 1911 et 1915, divisé en vingt-deux sections (jouées d’un seul trait), l’ouvrage illustre l’ascension héroïque d’un randonneur jusqu’au sommet d’un glacier. Il requiert un effectif instrumental énorme, pour ne pas dire gigantesque, dont une douzaine de cors ! Ici encore, Thieleman parvient à tirer le meilleur de sa phalange, reproduisant avec une belle maestria toute la palette de nuances et de couleurs que propose cette magnifique partition: les vents sont précis et trouvent leur juste place malgré les assauts des cuivres. Nous garderons en mémoire certains passages comme Orage et tempête, qui a fait trembler les murs du KKL, ou La Promenade près du torrent, nimbée d’une magnifique sensualité, à l'instar de la voix d'Anja Harteros...
Anja Harteros au Festival d'été de Lucerne – le 7 septembre 2015
Crédit photographique © Matthias Creutziger
10 septembre 2015 | Imprimer
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