Christophe Rousset dirige un intense Messie de Haendel à Evian

Xl_hx6a6943 © Matthieu Joffres

Après avoir été annulées l’an passé pour les tristes raisons que l’on sait, les Rencontres Musicales d’Evian ont débuté en fanfare (et avec trompettes) par une exécution du Messie de Haendel, porté avec passion par Christophe Rousset à la tête de ses Talents Lyriques. La magnifique acoustique de la non moins sublime salle de La Grange au Lac, avec sa forêt de bouleaux surmontée de six lustres en cristal (en fond de scène), a enchanté un public certes distancé, mais tellement heureux d’être là, qu’il parviendra à faire bisser le célèbre Allelujah à l’issue du concert… à force de taper des pieds !

Mais avant cela, le chef français aura séduit une nouvelle fois par la coloration qu’il parvient à insuffler à sa formation, en lui donnant également une légèreté et un élan inhabituels dans un ouvrage où le dramatisme l’emporte généralement sur la ferveur intimiste. L’effectif de vingt instrumentistes et de dix-huit choristes issus de l’excellent Chœur de Chambre de Namur (à l’articulation exemplaire !) l’explique en partie, mais on sent une volonté de la part de Christophe Rousset de faire ressortir le mysticisme de la géniale partition de Georg Friedrich Haendel, de loin la plus jouée parmi ses nombreux oratorios.

A coup sûr, cette exécution nous « rend meilleur », comme le souhaitait (textuellement) le compositeur allemand, grâce aussi à un quatuor de solistes qui vivent et disent l’amour et les souffrances du Christ, avec beaucoup d’engagement émotionnel. Avec son timbre éthéré, le contre-ténor américain Christopher Lowrey fait fondre les cœurs les plus récalcitrants avec un bouleversant « He was despised ». Délicate et transparente, la voix d’Amanda Forsythe lui fait bonne escorte, parfaite de légèreté d’aigu dans le « Rejoice greatly ! ». La basse argentine Nahuel Di Pierro fait toujours autant valoir ses beaux graves, et se montre idéal ici – par la véhémence de ses accents – pour l’évocation menaçantes des ténèbres (« For behold »), tout en faisant également fi des vocalises du brillantissime air « Why do the nations ». Quant au ténor étasunien Jason Bridges, il impressionne tant par sa longueur de souffle que par la joie simple et presque enfantine avec laquelle il délivre le fameux « Every valley shall be exalted ».

Bref, on ne pouvait rêver d'un meilleur ouvrage (et d'une pareille interprétation) pour une renaissance !

Emmanuel Andrieu

Le Messie de Georg Friedrich Haendel aux Rencontres Musicales d’Evian, le 26 juin 2021

Crédit photographique © Matthieu Joffres
 

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