Emily Magee et Daniel Harding illuminent le concert d'ouverture du second Festival de Pâques d'Aix-en-Provence

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Fort du succès de sa première édition (20 concerts, 500 musiciens, 14.000 spectateurs), le deuxième Festival de Pâques d'Aix-en-Provence – toujours sous la houlette artistique du talentueux violoniste français Renaud Capuçon – réaffirme sa volonté d'excellence en affichant, du 10 au 27 avril, une pléiade d'artistes fabuleux : Martha Argerich, Gustavo Dudamel (et l'Orchestre de Göteborg), Yo-Yo Ma, Yannick Nézet-Séguin (et l'Orchestre de Rotterdam), Nicholas Angelich, Ludovic Morlot (et l'Orchestre de La Monnaie), Mikhaïl Pletnev, Myung-Whun Chung (et l'Orchestre philharmonique de Radio-France)...

Pour la soirée d'ouverture, consacrée à Richard Strauss et Gustav Mahler, Renaud Capuçon a fait appel à deux spécialistes de ce répertoire : la soprano américaine Emily Magee et le chef britannique Daniel Harding, grand habitué du Festival d'été où il a dirigé nombre de productions lyriques.

La première partie de concert donne à entendre les sublimes Quatre derniers lieder de Strauss, composés dans les dernières années de sa vie, que le compositeur allemand passa en Suisse. La beauté du timbre d'Emily Magee – qui fait parfois penser à celui de Renée Fleming (certes avec un peu moins de chantilly et de nacre) –, ses aigus aisés et rayonnants, ainsi que ses superbes piani (enchanteurs dans le registre aigu) font merveille dans ces pages bouleversantes - et font légitimement d'elle une des meilleures chanteuses straussiennes de notre temps. Après un Frühling délicatement ciselé, elle délivre un September poignant de nostalgie, puis un Schlafengehen radieux et aérien, avant de conclure avec un Im Abendrot comme suspendu dans le temps et dans l'espace. Cette dernière évocation crépusculaire sait visiblement toucher le cœur des spectateurs qui lui fait une fête à tout rompre à l'issue de sa prestation.

C'est - après l'entracte - une émotion non moins grande qui submerge l'auditoire au bout des une heure et trente minutes que dure la Sixième Symphonie de Mahler (dite Tragique), couronnée par un silence de plus de dix secondes qui en dit long sur le choc que vient d'exercer cette merveilleuse page symphonique sur les spectateurs du Grand-Théâtre de Provence.  Mais c'est d'entrée de jeu que l'excellent Daniel Harding - à la tête du magnifique Orchestre Symphonique de la Radio Suédoise (qui a compté rien moins que Sergiu Celibidache, Yevgeny Svetlanov, Herbert Blomstedt ou encore Esa-Pekka Salonen comme directeurs musicaux) - nous prend à la gorge, en installant d'emblée la dimension tragique de l'ouvrage : la cruauté des thèmes et les rythmes inexorables l'emportent de fait, ici, fortement sur le thème féminin d'Alma ou le lyrisme enjoué de l'Andante moderato. Quant au Finale, il crée un climat de nuit profonde où tout est consommé et sans espoir, ce que vient confirmer les fameux trois coups de marteaux successifs, à la fin du mouvement, qui glace littéralement les sangs.

Un concert dont on sort étourdi - et une ouverture en fanfare pour le Festival 2014 !

Emmanuel Andrieu

Concert d'ouverture du Festival de Pâques d'Aix-en-Provence (au Grand-Théâtre de Provence)

Informations pratiques disponibles sur le site officiel du Festival

Crédit photographique © Caroline Doutre

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