Après Marseille, Liège, Zurich et Baden-Baden, c'est dans la superbe salle de la Philharmonie de Munich que Juan Diego Florez termine la tournée promotionnelle de son dernier disque intitulé L'Amour - dédié exclusivement au répertoire français. Star du chant adulé en Allemagne (mais comme un peu partout...), c'est sous un (premier) tonnerre d'applaudissements qu'apparaît le ténor péruvien, qui affiche son plus beau sourire, visiblement ravi de se produire sur le sol bavarois.
Après une Ouverture du Toréador (Adolphe Adam) brillamment exécuté par le chef espagnol Manuel Lopez-Gomez - placé à la tête d'un Münchner Rundfunkorchester qui apparaîtra la soirée durant comme galvanisé par la présence du ténor -, Florez débute son récital avec la célèbre romance de Nadir, « Je crois entendre encore » (Les Pêcheurs de perles), qui confirme ses affinités avec les rôles de demi-caractère. Comment ne pas être frappé cependant - ce qu'il nous a confirmé lors d'une Interview avant le concert - par le fait que la voix possède désormais un medium plus nourri, des couleurs presque barytonales, sans que le phrasé n'ait rien perdu de son infinie délicatesse, comme le prouve l'air qui suit, « A la voix d'un amant fidèle », tiré de La jolie fille de Perth de Bizet.
Autre constat, sa diction de notre langue est aujourd'hui parfaite, sans même la pointe d'accent qu'elle arborait autrefois, comme on peut le noter dans les deux airs de Werther qu'il délivre ensuite, « O nature, pleine de grâce » et « Pourquoi me réveiller », dernier air qui atteint peut-être les limites naturelles de sa voix, mais dont le luxe de raffinements ne peut qu'emporter l'adhésion, comme vient le souligner la salve nourrie d'applaudissements qu'il obtient de la part du public à la fin.
Après l'entracte, Florez renoue avec le triomphe qu'il a obtenu dernièrement avec le rôle de Fernand, dans La Favorite de Donizetti, notamment au Théâtre des Champs-Elysées et à l'Opéra de Monte-Carlo (nous y étions) : il en délivre le premier air, « Une femme, un ange inconnu », ciselé avec un incroyable sens du détail et des nuances. Place à une rareté ensuite, l'air de Iopas « O blonde Cérès » issu des Troyens de Berlioz, où il peut distiller à la fois son sens de la poésie comme son art de la déclamation. Nouveau triomphe dans la salle...
Il poursuit avec un rôle qu'il vient tout juste d'aborder dans son pays natal - c'était le mois dernier à l'Opéra de Lima -, celui de Roméo, à travers le célébrissime air « L'amour...Ah, lève toi soleil ! » (qui donne son nom à la soirée comme au disque). L'art avec lequel, après une reprise piano, il termine cet air sur une note mezzo-forte qu'il enfle graduellement pour atteindre un fortissimo électrisant, soulève à nouveau l'enthousiasme du public. Il achève la soirée avec un air plus léger tiré de La Belle Hélène d'Offenbach, « Sur le Mont Ida », qu'il interprète avec beaucoup de malice, ce qui plaît beaucoup à une audience qui devient survoltée dans son espérance de quelques bis. Et Florez n'en est pas avare en délivrant notamment deux airs de Verdi, le rare « Je veux encore entendre ta voix » tiré de son Jérusalem (version française d'I Lombardi) et surtout le tube qu'est « La donna è mobile », exécuté avec une urgence et une sincérité dans l'accent tout simplement confondantes. C'est donc debout que les bavarois finissent de remercier leur idole !
Juan Diego Florez en récital à la Philharmonie de Munich, le 15 décembre 2014
18 décembre 2014 | Imprimer
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