En plus des trois opéras sous sa baguette cette saison (La Vie parisienne, Pelléas et Mélisande, Marouf savetier du Caire), Marc Minkowski dirige également des concerts au sein de l’Opéra National de Bordeaux dont il a été nommé directeur général l’an passé. Ainsi ce Messiah de Georg Friedrich Haendel, un peu particulier, car exécuté en grande partie par de jeunes chanteurs et instrumentistes issus du Conservatoire de la ville : les Solistes des classes de chant du Conservatoire de Bordeaux-Jacques Thibaud et l’Orchestre Baroque du Conservatoire de Bordeaux-Jacques Thibaud, auxquels se sont greffés le Chœur d’hommes de l’Opéra National de Bordeaux (préparé par Salvatore Caputo) et la Jeune Académie Vocale Aquitaine (préparée par Marie Chavanel) pour la partie chorale (plus deux solistes invités).
Avouons d’emblée que les jeunes solistes vocaux n’ont pour la plupart pas convaincu, trop de problèmes techniques venant rendre l’écoute peu agréable : problèmes de souffle, de justesse, de ligne de chant, de projection (etc.). Nous ne citerons donc que les noms de ceux qui nous ont le plus convaincus, à commencer par le ténor britannique Christopher Diffey (mais qui, avec son compatriote Tristan Humbleton, est déjà professionnel dans son pays, et ne fait pas partie de l'institution girondine…). Il lui revient d’ouvrir le concert avec le magnifique air « Ev’ry valley », qu’il délivre avec une voix claire mais bien projetée, et surtout avec une joie simple et limpide. Citons également la jeune soprano Léa Frouté à qui est dévolu le ravissant « Rejoice greatly », qu’elle chante avec une voix pleine de fraîcheur et de pureté, et déjà un bel art de l’ornementation. Retenons aussi la mezzo Marie-Andrée Bouchard-Lesieur qui offre un bouleversant « He was despised », et donc une touchante illustration de la douleur humaine, avec une voix chaude aux beaux graves profonds. Citons enfin Tristan Humbleton qui impressionne par sa présence tant physique que vocale : le tableau qu’il dresse du Jugement dernier – avec l’air « The trumpet shall sound » – fait passer un frisson sur l’auditoire.
La fosse procure cependant un bien meilleur satisfecit que les voix solistes, d’autant qu’on a pris soin de mélanger (à peu près à part égale) élèves et professeurs. Marc Minkowski dirige avec la fougue qu’on lui connaît. Point de pompe victorienne ici, ni d’alanguissement mystique : c’est une foi vivante et dramatique qui tient lieu de fil conducteur. Les forces chorales, particulièrement fournies avec le chœur juvénile (comme le souhaitait Haendel, ce que rappelle Minkowski dans un petit discours en guise de préambule avant le concert), s’avèrent homogènes et mordantes, toujours remarquablement engagées, et assurent splendidement l’armature de ce chef d’œuvre. On retiendra en particulier le superbe « And he shall purify » qui parvient à créer une ambiance empreinte d’une douce paix et d’une chaleureuse confiance.
The Messiah de Georg Friedrich Haendel à l’Auditorium de Bordeaux, les 22 & 23 octobre 2017
Crédit photographique © Opéra National de Bordeaux
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