Reprise de L'Enlèvement au sérail selon Dieter Kaegi à l'Opéra de Marseille

Xl_l_enl_vement_au_s_rail___marseille © Christian Dresse

Trois ans après Monaco, c’est donc à l'Opéra de Marseille que fait escale la production « ferroviaire » de L’Enlèvement au sérail de Mozart, imaginée par le Suisse Dieter Kaegi. Nous en avions alors dit tout le bien que nous en pensions, et rien n’a été modifié ici, si ce n’est que des images de la cité phocéenne ont remplacées celles du Rocher… la gare de départ, en somme !

La distribution a, elle, en revanche été entièrement renouvelée et ne suscite pas moins d’enthousiasme que lors de la première mouture. Familière de la scène marseillaise où nous avons pu l'entendre notamment dans Lucia di Lammermoor, la soprano turque Serenad Burcu Uyar tire le rôle de Konstanze, par son tempérament, vers le dramatisme plus que vers la passion amoureuse. Avec son incarnation et sa voix très sûre, à la virtuosité jamais prise en défaut (impressionnant « Martern aller Arten » !), elle est une Konstanze tout simplement idéale. Face à elle, le jeune ténor français Julien Dran incarne le plus séduisant des Belmonte, avec cette délicatesse dans le phrasé, ce sens des nuances, le brillant du timbre, qui font de lui un exquis ténor mozartien. De son côté, Loïc Félix est un Pedrillo épatant de vie, de verve, de justesse vocale et d’aisance scénique, tandis qu’Amélie Robins campe une pétulante soubrette, à la voix habilement conduite, et un registre aigu aussi infaillible que délicieusement suave. Comme l’on pouvait s’y attendre, la basse wallone Patrick Bolleire s’avère un excellent Osmin, engoncé dans son costume de contrôleur des chemins de fer, ce qui n’est pas sans pertinence pour ce personnage obtus. Et la voix possède la rugosité et la profondeur nécessaires, sa noirceur étant tempérée par une verve comique très pince-sans-rire. Enfin, on retrouve avec plaisir le Sélim torturé de l’excellent acteur allemand Bernhard Bettermann, déjà présent à Monte-Carlo.

Côté musique, le bonheur également. Attaques précises, clarté des pupitres, le chef italien Paolo Arrivabeni obtient le meilleur de l’Orchestre Philharmonique de Marseille (qu’il est habitué à diriger). Son Mozart est fluide, enlevé, il brille sans clinquant, et les ensembles sont toujours remarquables de cohésion. Pas étonnant que le public phocéen ne boude point son plaisir, et fasse un triomphe à l’ensemble de l’équipe artistique !

Emmanuel Andrieu

L’Enlèvement au sérail de Mozart à l’Opéra de Marseille, jusqu’au 26 avril 2022.

Crédit photographique © Christian Dresse

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