Reprise du Barbier de Séville selon Pierre-Emmanuel Rousseau à l'Opéra de Saint-Etienne

Xl_ifr_0200-min © Fabrice Roure

Plébiscitée par le public et la critique à sa création en septembre dernier à l’Opéra national du Rhin (nous avions chroniqué le spectacle), la production du Barbier de Séville par Pierre-Emmanuel Rousseau a ravi également l’audience de l’Opéra de Saint-Etienne, où le spectacle est remonté à l’occasion des fêtes de fin d’année. Si cela se fait souvent, à l’occasion d’une reprise, de rajouter ou de retrancher quelque chose, le metteur en scène français (sur tous les fronts depuis quelque temps : il signe également une nouvelle production du Comte Ory - du même Gioacchino Rossini - ces jours-ci à l’Opéra de Rennes, avant que ce même spectacle ne soit repris, en janvier, à l’Opéra de Rouen…) n’a pas touché à un cheveu de son travail (mais il est vrai que celui-ci est tellement abouti... qu’on ne le lui reprochera pas !).

Si la distribution est entièrement renouvelée par rapport aux représentations rhénanes, celle-ci a payé de malchance avec la défection, tour à tour, des trois rôles principaux ! Le jeune baryton italien Daniele Terenzi est Figaro : la voix est assez communicative, le ton enjoué, mais il manque encore de couleurs variées dans la gorge, et ne prend pas assez le soin de caractériser les contrastes. D’origine israélienne, mais vivant en Italie, Reut Ventorero est une vraie mezzo, puissante, à la vocalisation parfaitement maîtrisée. Judicieusement, elle ornemente son air « Una voce poco fa » autant dans le registre grave qu’aigu, avec autant de charme que d’élégance. Elégance encore, chez le jeune ténor trévisan Matteo Roma , voix légère mais très bien projetée, agile et précise dans les vocalises. On regrette, dès lors, qu’il esquive le virtuose « Cessa di piu resistere », omis ici comme malheureusement le plus souvent. En Bartolo, le baryton français Frédéric Goncalves réussit une assez belle caractérisation, sans avoir tout à fait les réels moyens de basse bouffe que requiert son personnage (a contrario de son collègue Laurent Naouri, à l’affiche au même moment dans Viva la Mamma de Donizetti à Genève…). Dans le rôle de Basilio, le baryton français Vincent Le Texier (Arkel sur cette même scène en octobre dernier) se montre particulièrement inquiétant, encore plus horriblement grimé que son collègue à Strasbourg, tirant ici le personnage vers celui de Nosferatu, avec ses mains crochues et pendantes. Inénarrable, la Berta de la mezzo russe Svetlana Lifar, en vieille mégère espionnant tout le monde, pour laquelle on a eu la bonne idée de conserver la fameuse aria di sorbeto « Ora mi par che il core ». Enfin, le Fiorello de Ronan Nédélec, tout comme le Chœur Lyrique Saint-Etienne Loire, s’avère impeccable.

A entendre l’ouverture, on pouvait craindre que la direction de Michele Spotti (chef principal de l’Orchestre de Chambre de Milan) ne fût quelque peu languissante. La suite vient démentir cette impression. Non seulement le jeune chef lombard se montre - à la tête d'un excellent Orchestre Symphonique Saint-Etienne Loire - extrêmement précis, mais il impose une lecture sans brutalité, qui sait préserver l’incisivité des rythmes et la vivacité des couleurs instrumentales.

Emmanuel Andrieu

Il Barbiere di Siviglia de Gioacchino Rossini à l’Opéra de Saint-Etienne, jusqu’au 2 janvier 2019

Crédit photographique © Fabrice Roure


 

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