A raison de deux titres par an, le Coliseu de Porto – magnifique et immense théâtre Art déco de 3000 places situé en plein centre de la Cidade Invicta – célèbre le répertoire lyrique, et après Cosi fan tutte en septembre 2021, c’est Tosca de Giacomo Puccini qui a été retenu comme premier titre de la (succincte) saison opératique. Dans une ville où l’art lyrique est si peu représenté, et donc un public qui y est peu accoutumé, les mises en scène s’avèrent toujours très simples et lisibles, et celle confiée à l’homme de théâtre italien Alfonso De Filippis ne déroge certes pas à la règle. C’est donc dans une scénographie (signée Roberto Punzi) évoquant l’Eglise de Sant’Andrea della valle au I, comme une pièce d'apparat du Palazzo Farnese au II, que se déroule l’action, avec une certaine économie de moyens - mais sans faire cheap pour autant. On retient surtout les costumes qui citent directement ceux utilisés dans la célèbre production de Zeffirelli au Covent Garden de Londres avec Maria Callas et Tito Gobbi, en 1964, et notamment cette robe rouge sang et ce diadème que porte, ce soir également, la principale protagoniste du drame de Victorien Sardou. Pour le reste, une direction d’acteurs discrète mais néanmoins efficace permet à la soirée de se dérouler sans heurt.
La partie vocale laisse plus de traces, surtout pour les amateurs de voix sonores. Dans le rôle-titre, la jeune soprano portugaise Cristiana Oliveira affirme une rigueur musicale et une franchise irréprochable, avec un aigu assuré, de superbes piani dans le célèbre « Vissi d’arte », et un parlando expressif dans le final du II. Sa Floria Tosca force le respect, même si la voix pourrait posséder plus de couleurs pour parfaire à notre bonheur. De son côté, son compatriote Pedro Rodrigues offre de belles nuances à Cavaradossi. Son timbre lumineux, couplé à un aigu facile et puissant, lui permet de délivrer un splendide « E lucevan le stelle ». Le baryton italien Andrea Zese convainc beaucoup moins bien en Scarpia, car sa voix est à la fois avare de nuances, de mordant, de puissance et de projection : il s’avère totalement inaudible dans le fameux Te deum qui clôture le premier acte, de même que ses appels à l’aide et ses râles, après que Tosca lui a planté un couteau dans le cœur, passent totalement inaperçus ! Les rôles secondaires sont mieux distribués, avec notamment le formidable Angelotti de Rui Silva et le parfait Sacristain de Pedro Telles, de même qu’il faut saluer la superbe tenue du chœur, plus qu’épaulé par la Maîtrise du Conservatoire de Porto.
Quant au chef lusitanien José Ferreira Lobo, il obtient de l’Orquestra da Opera na Academia e na Cidade do Porto des accents authentiquement pucciniens, sans jamais reléguer les sentiments au second plan, et dirige avec autant de détermination que d’intensité le chef-d’œuvre du maestrissimo toscan.
Tosca de Giacomo Puccini au Coliseu de Porto, le 23 septembre 2022
Crédit photographique © Emmanuel Andrieu
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