Informations générales
- Nom:Sills
- Prénom:Beverly
- Nationalité:États-unis
- Tessiture:Soprano
Biographie
Dans le sillage de Maria Callas,la soprano américaine Beverly Sills fait partie de celles qui ont largement contribué à la redécouverte du bel canto romantique au milieu du XXème siècle. A l’instar de Montserrat Caballé, Joan Sutherland ou Renata Scotto, elle s’est illustrée dans les ouvrages de Rossini, Bellini et Donizetti. La carrière musicale de Beverly Sills est aussi brillante qu’atypique. La chanteuse s’est très peu produite en dehors des Etats-Unis et son immense célébrité repose en grande partie sur son exceptionnelle discographie qui permet au mélomane d’aujourd’hui d’apprécier pleinement les beautés et les prouesses d’une magnifique voix de soprano colorature. Pourtant Beverly Sills préférait la scène où elle se montrait captivante et rayonnante. La seconde particularité du parcours de la diva réside dans son choix d’interrompre sa carrière relativement tôt pour devenir directrice artistique du New York City Opera, où elle avait connu ses plus beaux succès. Le 27 octobre 1980, à cinquante et un an, Beverly Sills fait ses adieux au public lors d’un gala au NYCO qui rapporte un million de dollars au prestigieux établissement ! La grande soprano, baptisée « The Queen of Opera » par le Time Magazine, devient une femme d’affaires suffisamment avisée pour redresser les finances du NYCO ; elle s’impose comme une des figures de ce que les Américains appellent le « fund raising », la levée de fonds pour des causes culturelles ou humanitaires. A tout cela, il faut encore ajouter un goût prononcé pour la télévision où la cantatrice n’hésite pas à transgresser les codes en participant à des émissions comme le « Muppet Show ». Peu de divas peuvent se vanter comme elle d’avoir reçu deux Emmy Awards pour des prestations télévisées !
Beverly Sills ; © DR
Estelle Liebling ; © DR
Belle Miriam Silverman naît à Brooklyn le 25 mai 1929 dans une famille d’immigrés juifs originaires d’Ukraine et de Roumanie. La fillette fait ses débuts à la radio dès l’âge de trois ans et elle adopte le pseudonyme de Beverly Sills à sept ans. C’est une enfant prodige dont le talent vocal se développe dès sa neuvième année sous la houlette d’une pédagogue de grand renom, la soprano Estelle Liebling (1880-1970) qui sera son unique professeur de chant pendant trente-deux ans.
La carrière de la jeune soprano commence modestement avec un engagement dans une compagnie itinérante où elle se voit confier des rôles secondaires essentiellement dans des opérettes de Gilbert et Sullivan. De tournées en tournées, ses talents de comédienne s’affirment ainsi que son aisance naturelle en scène mais aucun agent ne semble prêt à lui donner sa chance. En 1955 elle décroche enfin un contrat prometteur et elle intègre la troupe du New York City Opera. A vingt-six ans, Beverly Sills a déjà dix ans d’expérience qui lui ont permis d’élargir son répertoire et de parfaire sa technique vocale ; elle va désormais se concentrer sur l’art de l’interprétation des grands rôles de soprano lyrique colorature. Pourtant, à trente-deux ans, la chanteuse envisage de tout arrêter car elle est très durement touchée dans sa vie personnelle. Elle découvre simultanément que les deux enfants qu’elle a eus avec son mari le journaliste Peter B. Greenough, patron du Cleveland Plain Dealer, sont tous deux atteints de graves handicaps qui expliquent leurs retards de développement. La petite Meredith souffre d’une surdité complète et son jeune frère, Peter jr. est très gravement autiste. Heureusement, la soprano se laisse persuader de revenir au New York City Opera où le chant devient pour elle une impérieuse raison de vivre. 1966 marque un véritable tournant dans sa carrière le soir où elle triomphe en Cléopâtre dans Jules César de Haendel. Celle qui n’était jusqu’alors qu’une interprète de second plan accède au statut de star sur les grandes scènes internationales. En 1967, Beverly Sills chante la Reine de la Nuit au Staatsoper de Vienne, puis l’année suivante elle est de nouveau Cléopâtre au Teatro Colon de Buenos Aires. En 1969, elle triomphe à la Scala aux côtés de Marilyn Horne dans Le Siège de Corinthe de Rossini. En 1970, elle marque à jamais le rôle de Marie dans La Fille du régiment de Donizetti qu’elle chante au San Carlo de Naples, au Covent Garden de Londres ou à Carnegie Hall, et qu’elle enregistre sous différents labels. Comme le dit avec humour, et beaucoup de regret Sylvain Fort : « quiconque n’a pas entendu Beverly Sills dans ses moments de haute voltige persistera à prendre pour une Formule 1 les Peugeot 307 qu’on nous sert aujourd’hui sur les scènes internationales ». Il est en effet urgent d’écouter les nombreux enregistrements réalisés par cette chanteuse « extraordinaire » au sens propre. Il ne faut pas manquer ses deux intégrales les plus magistrales parmi les dix-huit qu’elle a réalisées : Manon de Massenet sous la direction de Julius Rudel, et Lucia di Lammermoor de Donizetti avec Thomas Schippers à la baguette.
Beverly Sills en Elizabeth I dans Roberto Devereux de Donizetti au
New York City Opera en 1972 ; © Jack Mitchell/Getty Images
Ce n’est qu’en 1975 que Beverly Sills fait ses débuts officiels au Metropolitan de New-York dans ce Siège de Corinthe de Rossini où elle obtient vingt minutes de rappel en brillant de tous ses feux en Pamira. La chanteuse est alors au firmament de sa gloire mais sa voix, qu’elle n’a pas ménagée, commence à donner des signes de faiblesse. La soprano colorature s’est attaquée à des rôles trop lourds pour elle. Sa voix légère par nature n’a pas résisté aux rôles terriblement exigeants qu’elle a fini par accepter en entrant dans le cœur de l’univers de Donizetti. En 1969 Beverly Sills aborde Roberto Devereux où elle incarne une reine Elisabeth fascinante malgré ses insuffisances vocales. Puis la soprano interprète les deux autres reines de Donizetti dans Anna Bolena et Maria Stuarda. Beverly Sills enregistre la fameuse « trilogie Tudor » alors que Leyla Gencer et Montserrat Caballé y avaient renoncé.
En incarnant les trois reines de Donizetti, Beverly Sills a trouvé des rôles à la mesure de son talent de tragédienne, et qu’importe si ces choix ont compromis sa carrière comme elle le confiait à Opéra International : « Elisabetta (…) a très probablement abrégé ma carrière, un peu comme si vous tiriez sur un élastique au-delà de sa résistance…Mais je ne regrette rien : mieux valent dix années excitantes que vingt monotones ! ». La chanteuse prit congé de la scène à cinquante et un an comme elle l’avait annoncé. Pendant dix ans elle allait être la directrice artistique du New York City Opera. En 2002, elle accepte la présidence du Conseil d’administrationdu Metropolitan Opera. Beverly Sills s’éteint d’un cancer du poumon le 2 juillet 2007 laissant le souvenir non seulement d’une artiste incomparable mais aussi d’une femme à la générosité et au rayonnement exceptionnels.
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