Ce 9 mars dernier à Palm Springs en Californie, le chef américain James Levine – dont les nombreux problèmes de santé étaient de notoriété public – est décédé à l’âge de 77 ans de « causes naturelles ». Le New York Times s’en faisait l’écho hier et son médecin personnel, le Dr. Len Horovitz, confirmait l’information.
Et évidemment, James Levine laisse un souvenir ambigu : il aura été l’une des figures emblématiques du Metropolitan Opera de New York pendant plus de 40 ans, mais sa fin de carrière restera entachée par une série d’accusations de comportements déplacés à l’égard de jeunes hommes pendant des décennies, qui conduira à son éviction de la maison new-yorkaise en 2018 – qu’il contestera devant les tribunaux.
Avant cette fin de carrière peu glorieuse, James Levine a néanmoins été l’un des plus grands chefs d’orchestre américains. Dès son plus âge, il aura baigné dans un environnement musical : il nait dans une famille de musiciens, s’initie très tôt au piano et donne ses premiers concerts à l’âge de dix ans – il continuera à se produire ponctuellement tout au long de sa vie. C’est donc assez naturellement qu’il intègre la Juilliard School of Music de New York, dont il sortira diplômé en 1964, avant de poursuivre sa formation auprès de George Szell. Il se fera remarquer à la tête du Chicago Symphony Orchestra ou au Festival de Ravenne, mais sa carrière prend son envol le 5 juin 1971 quand il dirige Tosca pour la première fois au Metropolitan Opera, alors qu’il n’a encore que 28 ans.
L’année suivante il sera nommé chef principal du Met Opera, puis directeur principal de l’établissement en 1975 et il en deviendra le premier directeur artistique en 1986. James Levine se revendiquait néanmoins d’abord comme un musicien (avant d’être un directeur) et il hissera le Met Orchestra parmi les principales phalanges du monde lyrique, multipliera les enregistrements, et fera sortir la formation de la fosse du Met à l’occasion de tournées internationales ou de séries de concerts notamment au Carnegie Hall. James Levine était aussi l’un des ardents défenseurs de la « tradition » du Met et il contribuera à forger cette image très classique de l’établissement new-yorkais, mais il fera toutefois aussi fait entrer à son programme des œuvres contemporaines. Au cours de sa carrière, il a ainsi dirigé plus de 2500 représentations au Met Opera, se réservant les œuvres majeures, les nouvelles productions ou les plus belles distributions, au point qu’on reproche parfois à la maison new-yorkaise de ne pas avoir suffisamment invité de chefs extérieurs.
Si le chef affiche un parcours musical d'envergure, il s'achèvera piteusement. La carrière de James Levine sera écornée une première fois en décembre 2017, quand des rumeurs évoquent un comportement déplacé à l’égard de jeunes hommes, pendant plusieurs dizaines d’années depuis la fin des années 1960. Il est alors suspendu, puis une enquête sera ouverte par la maison new-yorkaise qui met fin au contrat du chef en mars 2018 sur la base « d’éléments crédibles d’abus et de harcèlement sexuels ». James Levine engagera des poursuites contre le Met Opera, pour rupture abusive de contrat et diffamation, avant qu'elles ne soient conclues par un accord à l'amiable au cours de l’été 2019 (James Levine met un terme à ses poursuites contre une transaction de 3,5 millions de dollars).
L’année dernière, James Levine aurait dû faire son retour sur scène à la tête de l’Orchestra di Santa Cecilia au Maggio Musicale Fiorentino, avant que la performance ne soit finalement annulée pour cause de pandémie.
17 mars 2021 | Imprimer
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