
Grandes œuvres de répertoire défendues par des distributions d’exception, découvertes d’opéras rares, curiosités lyriques voire créations, quels sont les opéras à ne pas rater au cours de ce mois de mars 2025, en salle ou au cinéma ? Retenons par exemple Fidelio au Metropolitan Opera chanté par Lise Davidsen ou Juliette ou la clé des songes, chef d’œuvre méconnu de Bohuslav Martinů à l’Opéra de Nice ; l’exploration du répertoire lyrique russe par Calixto Bieito au Grand Théâtre de Genève ; la promesse d'une nouvelle production poétique des Pêcheurs de Perles à l'Opéra de Dijon ou le Festival de l'Opéra de Lyon... Sélection subjective et non exhaustive.
Lise Davidsen est Fidelio au Metropolitan Opera
Opéra au cinéma. Du 4 au 15 mars, le Metropolitan Opera de New York reprend Fidelio dans la production de Jürgen Flimm – le metteur en scène transpose l’action de l’unique opéra de Beethoven dans un contexte contemporain, dominé par un pouvoir militaire oppressif qui emprisonne Florestan et conduit Leonore (sous les traits de Fidelio) à tenter de le libérer.
Si la production est déjà bien connue, cette reprise suscite l’intérêt pour sa distribution : Lise Davidsen reprend le rôle-titre, après une prise de rôle triomphale en 2020, au Royal Opera de Londres, unanimement saluée par la critique. Hasard des distributions, elle partageait notamment la scène londonienne avec David Butt Philip (en alternance avec Jonas Kaufmann), et elle retrouve le ténor britannique à New York, de nouveau dans le rôle de Florestan. La production devrait par ailleurs avoir une saveur particulière pour la soprano : Lise Davidsen a annoncé attendre un heureux événement et ce Fidelio sera sa dernière apparition sur scène avant de mettre sa carrière en pause pendant quelques mois afin de se consacrer à sa famille.
La représentation du 15 mars fait l’objet d’une captation vidéo depuis le Met de New York et d’une retransmission en direct dans les cinémas à travers le monde.
- En savoir plus : Fidelio au cinéma depuis le Metropolitan Opera du 4 au 15 mars 2025
Redécouverte de Juliette ou la clé des songes à l'Opéra de Nice
Michel, jeune libraire de rue, est à la recherche de Juliette. Il se souvient l’avoir croisée trois ans plus tôt, et le souvenir de la jeune femme l’a profondément marqué. Les habitants de la ville où il la cherche semblent néanmoins n’avoir aucune mémoire au-delà de quelques instants... Adapté de la pièce du poète surréaliste Georges Neveux, Juliette ou la clé des songes du compositeur tchèque Bohuslav Martinů nous embarque dans un récit onirique où les rêves et souvenirs se confondent, tantôt plus séduisants que la réalité, tantôt aussi plus dangereux.
Les 11, 13 et 15 mars prochain, l’Opéra Nice Côte d'Azur invite à redécouvrir le chef d’œuvre (injustement) méconnu de Martinů – que le compositeur a achevé lors d’un séjour à Nice. L’institution confie cette nouvelle production au duo de metteurs en scène Jean-Philippe Clarac et Olivier Deloeuil, dont on connait les mises en scène souvent inventives : dans le cas présent, ils inscrivent les pérégrinations oniques du héros de l'opéra dans le cadre d'une « troublante expérience de mort imminente ». Le rôle principal se remémore les souvenirs de Juliette (est-elle réelle ou imaginaire ?), entouré des membres du personnel médical du CHU Pasteur de Nice. La production invite ainsi à une exploration mémorielle sur les traces de la jeune femme, tout en explorant aussi les hauts lieux de la ville de Nice.
Festival d’opéras 2025 de l’Opéra de Lyon
Chaque année aux portes du printemps, l’Opéra de Lyon organise son festival d’opéra articulé autour de trois ouvrages lyriques réunis par une même thématique. L’édition 2025 se tiendra du 14 mars au 2 avril et invite à se « saisir de l’avenir » au travers de « trois histoires où tous les personnages cherchent à s'emparer de leur futur pour l'imaginer et le rêver autrement ». Comme souvent, le Festival promet des ouvrages de répertoire et d’autres plus contemporains.
Cette année, le programme compte d’abord une Force du destin confiée à la direction musicale experte de Daniele Rustioni mais aussi au jeune metteur en scène allemand « pop » Ersan Mondtag qui inspire une certaine curiosité. S’y ajoute ensuite « l’opéra syndical » de Giorgio Battistelli, 7 Minuti, basé sur la lutte syndicale (réelle) des ouvrières de l’usine de lingerie Lejaby. La création de l’œuvre en 2019 avait suscité l’enthousiasme, l’Opéra de Lyon en propose une nouvelle production signée de la metteuse en scène de théâtre Pauline Bayle. Le programme se complète enfin d'une création, L'Avenir nous le dira de la compositrice Diana Soh, commandée spécialement pour la maîtrise de jeunes chanteurs de l’Opéra de Lyon – qui auront vocation à interagir avec un imposant orchestre mécanique sur scène pour interroger les relations entre l’humain et la machine.
- À lire également : présentation du Festival de l’Opéra de Lyon 2025 : « Se saisir de l'avenir »
- En savoir plus : Festival Se saisir de l'avenir du 14 mars au 2 avril 2025
Les Pêcheurs de Perles, l’autre opéra de Bizet à l’Opéra de Dijon
Alors qu’on célèbre actuellement les 150 ans de la création de Carmen, c’est « l’autre opéra » de Bizet, Les Pêcheurs de Perles, que programme l’Opéra de Dijon les 19, 21 et 23 mars prochains. L’établissement en propose une nouvelle production confiée à la metteuse en scène Mirabelle Ordinaire, à l’origine du projet et qui indique transposer l’ouvrage orientaliste... dans l’appartement du compositeur. Le jeune Bizet n’a pas 25 ans quand il compose son opéra et n’a jamais quitté Paris. La metteuse en scène en fait l’un des protagonistes de sa production, alors qu’il imagine un Orient fantasmé : les échafaudages du Palais Garnier alors en construction deviennent les mâts de navires en partance pour de lointaines contrées, les colonnes de l’édifice évoquent les temples d’Orient, les eaux du chantier prennent des allures d’océan Indien... L’appartement se mue progressivement en plage de pêcheurs de perles, pour mieux souligner la poésie de l’ouvrage.
Pour l’occasion, l’Opéra de Dijon réunit en outre une jeune distribution attractive : Hélène Carpentier (Leïla) qui brille notamment dans le répertoire français, Julien Dran en Nadir qui nous confiait en interview qu’il s’agit là de son rôle préféré malgré sa difficulté technique ou encore Philippe-Nicolas Martin en Zurga, rôle dans lequel il s’est déjà distingué, notamment à l’Opéra de Saint-Etienne. Pour faire bonne mesure, la direction musicale est confiée à Pierre Dumoussaud à la tête de l’Orchestre Dijon Bourgogne et du Chœur de l’Opéra de Dijon, pour faire vibrer l'envoûtante partition de Bizet.
- En savoir plus : Les Pêcheurs de Perles à l'Opéra de Dijon les 19, 21 et 23 mars
Calixto Bieito met en scène La Khovantchina au Grand Théâtre de Genève
Au Grand Théâtre de Genève, du 25 mars au 3 avril prochains, le metteur en scène Calixto Bieito poursuit son exploration du répertoire lyrique russe avec une nouvelle production de La Khovantchina de Modeste Moussorgski – après son Guerre et Paix de Prokofiev en 2021 et la reprise de Lady Macbeth de Mtsensk de Chostakovitch en 2023. L’opéra de Moussorgski, qui évoque la transformation de la Russie par Pierre le Grand et la répression sanglante qui en découle, se révèle (douloureusement) d’actualité. Et pour autant, Calixto Bieito devrait en proposer une lecture plus sociale que réellement politique.
Restée inachevée à la mort de Modeste Moussorgski, l’œuvre a d’abord été complétée par Rimsky-Korsakov (la version la plus couramment donnée), puis ensuite par Chostakovitch dans une version jugée plus fidèle à l’esprit de Moussorgski mais plus rarement proposée du fait d'une certaine modernité. Le théâtre genevois a opté pour cette seconde version dans l’instrumentation de Chostakovitch avec le final de Stravinsky, et en confie la direction musicale au chef Alejo Pérez (déjà à l’œuvre aux côté de Calixto Bieito pour Guerre et Paix et Lady Macbeth de Mtsensk). Le chef dirigera l’Orchestre de la Suisse Romande et la Maîtrise du Conservatoire populaire de Genève. La production s'annonce comme l'un des grands rendez-vous de la saison.
- En savoir plus : La Khovantchina au Grand Théâtre de Genève les 25, 28 et 30, mars, 1er et 3 avril 2025
Et aussi...
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Rareté. « Le Troll sous la terre dit : ne pense qu’à toi ! L’Homme dans la lumière de la voûte étoilée dit : Sois toi-même quoi qu’il en coûte. » Le Théâtre du Châtelet donne le rare Peer Gynt du 7 au 16 mars et Olivier Py en propose une « tradaptation », une traduction adaptée du texte d’Ibsen sur la musique de Grieg dans une mise en scène aux allures de récit de voyage initiatique dans l’espace et dans le temps... En savoir plus
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Jeunes talents. L’Académie de l’Opéra de Paris accompagne la nouvelle génération d’interprètes lyriques en leur offrant une scène où se produire en public. Du 11 au 21 mars dans l’Amphithéâtre Olivier Messiaen de l'Opéra Bastille, ils interpréteront L’Isola disabitata, « azione teatrale » de Haydn, dans une nouvelle mise en scène de l’ancien danseur du Ballet de l’Opéra Simon Valastro et sous la direction musicale de François López-Ferrer. L’occasion de (re)découvrir les talents de demain. En savoir plus
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Prise de rôle. Du 22 mars au 6 avril, le Théâtre des Champs-Élysées reprend Werther dans la mise en scène Christof Loy qui a fait le bonheur de la Scala de Milan l’année dernière. Comme à Milan, Benjamin Bernheim reprend le rôle-titre qui lui va si bien. À ces côtés, Marina Viotti s’offre une prise de rôle en Charlotte, « un rêve de très longue date » pour la mezzo-soprano. En savoir plus
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Création insolite. Les amateurs d’opéra connaissent bien La Flûte enchantée, mais on sait moins que le Singspiel de Mozart a fait l’objet d’un deuxième opus (Das Labyrinth par Schikaneder) et que Goethe a aussi esquissé le projet d’une suite. Au Lido2, Jean-Luc Choplin a souhaité concrétiser cette suite de Goethe dans un « electro opera », The Magic Flute, the Sequel : The Curse, dont la musique est signée du chanteur Damon Albarn, sur un livret de Jeremy Sams, d’après Goethe donc. La création mondiale de cette curiosité est prévue du 27 au 30 mars prochains au Lido2. En savoir plus
- Prise de rôle. Du 29 mars au 25 avril, l’Opéra de Paris reprend Don Carlos (en version française) dans la mise en scène de Krzysztof Warlikowski, déjà donnée en 2017 et reprise en 2019. Si la production enthousiasmait finalement assez peu, cette reprise suscite néanmoins une certaine curiosité grâce à sa distribution et plus spécifiquement la prise de rôle de Marina Rebeka dans le rôle d’Elisabetta – aux côtés de Charles Castronovo dans le rôle-titre, Christian Van Horn en Philippe II et Ekaterina Gubanova en Eboli. En savoir plus
publié le 3 mars 2025 à 15h44 par La rédaction
03 mars 2025 | Imprimer
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