Depuis déjà quelques années, les retransmissions d'opéras hors des salles de spectacles prennent de plus en plus d'ampleur dans le monde lyrique. Certains établissements diffusent ainsi leurs productions en direct à travers le monde dans les salles de cinéma, d’autres offrent des séances de rattrapage en ligne, alors que certaines salles de cinéma misent plus volontiers sur la projection d’enregistrements (parfois anciens) d’opéras emblématiques.
Le Royal Opera House de Londres se veut l’un des acteurs de cette diffusion large de ses productions (la maison londonienne assure la retransmission de la totalité de son programme de la saison prochaine, opéras comme ballets) et entend allier le meilleur des différents formats actuellement proposés au public. En plus des diffusions en direct de ses productions dans les salles de cinéma, le ROH entend dorénavant proposer aussi des séances de rattrapage de ses diffusions live, toujours dans les salles obscures mais en différé, le week-end. De quoi toucher un autre public, peu disponible en semaine ou le soir.
Ainsi, pour chacune des onze représentations d’opéra ou de ballet diffusées au cinéma cette saison, une séance de rattrapage sera programmée le dimanche suivant la projection live. Une occasion pour les amateurs de danse d'assister par exemple à Alice's Adventures in Wonderland, au Lac des Signes ou à La Fille Mal Gardée, et pour les mélomanes d'entendre notamment Jonas Kaufmann dans Andrea Chenier et Anna Netrebko dans La Bohème.
Le Royal Opera House, qui se veut l’un des leaders dans le domaine des retransmissions aux côtés de maisons prestigieuses comme le MET de New-York, la Monnaie de Bruxelles ou encore le Wiener Staatsoper de Vienne, revendique déjà quelque 700 000 spectateurs au cinéma lors de la saison passée, soit une audience doublée au regard de la saison précédente.
Un chiffre finalement peu étonnant au regard de l'impact de la numérisation quasi-systématique de la culture dans le monde d'aujourd'hui, facilitant d’autant son accès à moindre coût pour le plus grand nombre.
Pour autant, même si le nombre de spectateurs augmente dans les salles, leur population ne semble que peu se renouveler. En effet, l'intention première des maisons d'opéra à travers les retransmissions au cinéma était de toucher un nouveau public, moins fortuné mais plus jeune. Or une récente étude de l'English Touring Opera et de la Guildhall School of Music & Drama menée à Londres tend à montrer au travers de sondages réalisés auprès des spectateurs des productions du ROH dans les salles qu'elles sont encore peuplées à 80% de spectateurs âgés de plus de 60 ans, pour moins de 10% de de moins de 50 ans.
Ainsi, même si l'opéra tend à se démocratiser grâce aux contenus numériques et aux diffusions sur Internet, au cinéma ou encore en DVD, la route semble encore longue pour les producteurs du monde lyrique qui devront sans doute redoubler d'imagination pour continuer à élargir leur public. Un nouveau chantier auquel s’attèle déjà le Royal Opera House qui entend aussi renouveler son répertoire (trop classique) et proposer « quinze nouveaux opéras d’ici 2020 » que ce soit au travers de mises en scène inédites et novatrices ou la commande de nouvelles œuvres. À n'en pas douter, l'opéra reste un art vivant.
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