Acis et Galatée prolonge le premier weekend du festival d'Hardelot

Xl_dsc_2653 © Midsummer Festival

Après la Carmen à laquelle nous avions assistée la veille, le festival d’Hardelot nous réservait un samedi des plus agréables, dans son cadre onirique, entre concert dans la serre, café, transat au soleil, château et verdure, sans oublier une version concertante d’Acis et Galatée en fin de journée avant un after détonnant en compagnie de Romy Pétale. Le cadre a tout d’un enchantement baudelairien et d’une invitation au voyage : « Là, tout n'est qu'ordre et beauté, Luxe, calme et volupté ».

C’est à l’Ensemble Masques que le festival a fait appel pour rendre compte de la beauté de la partition de Haendel. Si l’homogénéité et l’unité de l’ensemble n’étaient pas tout à fait parfaites – avec par exemple un violon se hissant pour quelques notes au-dessus de l’ensemble – le rendu n’en demeurait pas moins très beau sous la direction d’Olivier Fortin, également au clavecin. Les couleurs demeurent présentes, et les musiciens hissent haut la musique de Haendel. Celle-ci s’avère particulièrement expressive et se plait à glisser d’un instrument à l’autre pour former un tout qui n’a finalement pas besoin de mise en scène pour amener à nos esprits les images de ce semi-opéra. L’entracte proposé n’était peut-être pas nécessaire, mais le changement de ton avec l’arrivée du cyclope au deuxième acte s’y prête toutefois.

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Acis et Galatée, Festival d'Hardelot © Midsummer Festival

Rachel Redmond accapare l’intention dans le rôle de Galatée par son charme naturel et une présence qui s’imposent sans effort. Légèreté, joie, amour ou encore l’intransigeance de la nymphe s’expriment parfaitement à travers l’interprète. Toutefois, après tous ces sentiments si bien traduits, on aurait peut-être attendu davantage d’intensité dans le chagrin – néanmoins bien présent – exprimé à la mort et à la transformation de son bien-aimé. Ce dernier est interprété par Hugo Hymas qui offre une belle ligne de chant et un beau timbre, mais dont l’incarnation demeure un peu timide. Philippe Gagné est un Damon particulièrement investi, délaissant sa tablette au profit de son jeu, tandis que Marie Pouchelon s’empare sans mal du rôle des chœurs dans cette distribution restreinte.

Toutefois, celui qui remporte tous les suffrages est le Polyphème de Thomas Kral. La voix est ample, suave, élégante – contrairement à son personnage – le souffle est chaud et bien projeté. Là aussi, l’artiste délaisse sa partition pour offrir un personnage tout en intensité, se trémoussant contre les poteaux, jouant avec sa langue, gémissant, surgissant du premier balcon pour lancer son rocher… On en viendrait presque à l’aimer tant il donne vie et dimensions à ce personnage.

Certes, cette version de concert d’Acis et Galatée ne déverse pas la même intensité que la Carmen de la veille, mais elle n’en demeure pas moins très réussie et a su ravir le public présent. Le festival offrait ainsi une soirée agréable, qui demeurait par malchance dans l’ombre de l’exaltation du spectacle de la veille.


Romy Pétale, Midsummer Festival d'Hardelot © Midsummer Festival

A noter qu’après ce concert, le public était convié à un after d’un tout autre ordre, dans un baroque remastérisé façon XXIe siècle avec Romy Pétale, personnage inventé par Martial Pauliat – qui interprète Don José en alternance avec Kaelig Boché que nous avons vu. Un rendez-vous haut en couleurs, loufoque, poétique, avec un véritable travail sur la musique puisque Romy Pétale emprunte des œuvres dont elle conserve la mélodie tout en se les accaparant avec des textes personnels. Sa complainte du clavecin en est un exemple parmi tant d’autres. Une belle découverte, qui fit naître un seul regret en ce qui nous concerne : ne pas avoir un programme dans lequel l’ensemble des œuvres sont indiquées. En effet, le résultat est tel que l’oreille reconnaît l’air… mais ne parvient plus à assimiler les paroles ni le contexte originels, perdant ainsi souvent la référence première ! Le personnage et les spectacles peuvent encore gagner à être davantage affinés, mais le résultat présenté samedi soir a déjà de quoi satisfaire bien des attentes, et surtout offrir une très bon moment !

Elodie Martinez
(Hardelot, le 22 juin)

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