Samedi soir, le parvis de la Basilique Saint-Michel Archange de Menton accueillait le concert d’ouverture de la 69e édition du festival de musique de Menton qui est également la sixième édition du directeur actuel, Paul-Emmanuel Thomas. Une nouvelle fois, ce dernier propose un programme exceptionnel qui débutait ce 28 juillet par un récital de Philippe Jaroussky et Emöke Baráth qui se retrouvaient ici pour des airs et duos de Haendel, dans le cadre toujours aussi féérique du parvis avec la vue sur la mer pour quatrième mur.
La soirée débute avec Ariodante et son Ouverture parfaitement exécutée par l’Ensemble Artaserse qui donne à ce récital une belle dimension supplémentaire, s’harmonisant à la perfection avec les voix qu’il accompagne, les portant sans jamais passer au-dessus. Il faut dire que cet ensemble créé à l’origine par le contre-ténor, Christine Plubeau (viole de gambe), Claire Antonini (théorbe) et Yoko Nakamura (clavecin et orgue) est aujourd’hui reconnu et réputé comme étant l’un des ensembles sur instruments d’époque les plus passionnants de la scène musicale. Une réputation qui se confirme tout au long de la soirée, malgré la chaleur et l’humidité qui ne font jamais bon ménage pour ce genre d’instruments.
C’est ensuite au tour de l’air « Qui d’amor nel suo linguaggio » et du duo « Prendi da questa mano », toujours extraits d’Ariodante, de permettre au public d’entendre ces deux voix exceptionnelles réunies ce soir, mais que le public a déjà pu entendre ensemble à diverses reprises, comme dans Alcina en mars dernier au Théâtre des Champs-Elysées ou encore dans Orfeo ed Euridice sur cette même scène parisienne en mai, parallèlement à la sortie de l’album chez Erato. Le duo est donc déjà bien rodé, ce dont on se rend bien vite compte : les deux artistes paraissent en effet bien se connaître et leur relation ne peut que transparaître sur scène pour servir encore mieux leurs interprétations. Le couple ainsi créé lie les différents extraits dans l'histoire d’un couple connaissant une crise mais où, finalement, tout finit bien. D’ailleurs, le dernier air de la soirée sera un autre duo d’Ariodante, « Bramo aver mille vite ». Pour parfaire cette happy ending, le public aura droit à deux bis, dont « Vivo in te » de Tamerlano.
Avant toutefois de connaître cette paix retrouvée, le couple enchainera des extraits de Giulio Cesare, Rodelinda, Serse, Lotario, Parasso in festa ou encore Scipione, qui permettront d’entendre la Berenice d’Emöke Baráth, pleine de charme et extrêmement touchante. Comme tout au long de la soirée, la ligne de chant est claire, de même que la projection également portée par l’amplification des micros qui sait se faire relativement discrète malgré quelques légers soucis ponctuels. Difficile de ne pas succomber à ses aigus aux accents parfois cristallins. En belle harmonie, Philippe Jaroussky s’avère être un binôme de choix avec une parfaite projection et une prononciation excellente. Les deux voix se marient parfaitement entre elles, créant une de ces alchimies qui ne s’expliquent pas.
Une soirée d’ouverture qui annonce un festival haut en couleur, dans une excellence renouvelée d’année en année et qui laisse déjà rêveur quant à ce qui attendra le public pour l’édition anniversaire de l’été prochain.
Elodie Martinez
(Menton, le 28 juillet 2018)
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