Informations générales
- Date de naissance:24/02/1842
- Date de décès:10/06/1918
- Nationalité:Italie
Biographie
Arrigo Boito a inscrit son nom dans l’histoire de l’art lyrique grâce à Mefistofele, son seul opéra achevé, qui se déploie comme une vaste fresque métaphysique. À cette activité de compositeur s’ajoutent bien d’autres talents car ce fils d’un peintre italien et d’une comtesse polonaise avait de multiples cordes à son arc et il s’imposa rapidement comme une des figures majeures de la vie artistique italienne de son temps. Poète, théoricien, critique musical, écrivain, Boito fut aussi le librettiste de Giuseppe Verdi pour Otello (1887) et Falstaff (1893) et celui de Ponchielli pour La Gioconda (1876).
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Enrico, appelé plus tard Arrigo, Boito, est né à Padoue le 24 février 1842. Des conflits opposent ses parents qui se séparent rapidement. Après le départ du père, Silvestro Boito, l’éducation d’Arrigo et de son frère aîné Camillo est assurée par leur mère, la comtesse polonaise Giuseppina Radolinska qui met tout en oeuvre pour favoriser la vocation artistique de ses deux fils. Camillo étudie à l’Académie des Beaux-arts de Venise et Arrigo est inscrit au Conservatoire de Milan où il étudie le violon, le piano et la composition avec Alberto Mazzucato (1813-1877). Le jeune Arrigo se lie d’amitié avec le futur compositeur et chef d’orchestre Franco Faccio (1840-1891) qui dirigera de nombreux opéras de Verdi.
Après la mort de la comtesse Radolinska en 1859, Camillo subvient aux besoins de son jeune frère Arrigo pour lequel il sera toujours un précieux soutien et un conseiller fidèle. Camillo s’illustrera comme architecte, critique d’art, et écrivain. Il est l’auteur de Senso (1883), un récit que Lucchino Visconti portera à l’écran en 1954.
En 1860, Boito s’associe à son ami Faccio pour composer une cantata patria intitulée Il quattro giugno. En 1861, les deux amis récidivent pour leur diplôme de fin d’études au Conservatoire avec un mistero : Le sorelle d’Italia. Les deux ouvrages ont été mis en musique à partir d’un texte écrit par Boito qui s’impose déjà comme poète et musicien. Les deux amis obtiennent une bourse d’études qui leur permet de voyager à travers l’Europe. A Paris, Boito fait plusieurs rencontres déterminantes. Il fréquente Hector Berlioz, Victor Hugo, Gioacchino Rossini et Giuseppe Verdi pour lequel il écrit les paroles d’un Inno delle Nazioni. C’est lors de ce séjour dans la capitale française que Boito entame la composition d’un Faust d’après Goethe tout en projetant un Nerone d’après Tacite.
À la fin de 1862, le jeune musicien retrouve Milan où il participe au mouvement d’avant-garde artistique et patriotique appelé « la Scapigliatura », dont l’objectif était de révolutionner l’art lyrique italien. En 1863, dans une « Ode all’arte italiana », Boito vise violemment Verdi qui n’oubliera pas facilement cette offense ! Durant ces années, le jeune musicien collabore à plusieurs journaux et revues littéraires où l’on peut découvrir ses poèmes. Il entretient aussi une courte correspondance avec Victor Hugo. En 1866, il s’engage avec son ami Faccio aux côtés des partisans de Garibaldi pour la troisième guerre d’indépendance italienne. De retour à Milan, Boito achève la composition de son « opéra-manifeste », Mefistofele, ce Faust italien qui reste l’unique tentative musicale de restitution des deux Faust de Goethe.
Le 5 mars 1868, à la Scala de Milan, Mefistofele est créé sous la direction du compositeur lui-même dans une agitation telle que la police dut intervenir. Le public milanais accueillit par des huées et des sarcasmes l’œuvre de ce jeune compositeur de 26 ans, lié à l’avant-garde littéraire. Malgré un élan novateur marqué par de fulgurantes intuitions et des contrastes déstabilisants pour l’auditeur, la partition recèle de nombreuses influences, à commencer par celles de Charles Gounod et de Richard Wagner. L’esthétisme du grand opéra à la Giacomo Meyerbeer et l’écriture mélodique profondément italienne, encore proche du bel canto, estompent la volonté réformatrice du compositeur. Durant les sept années suivant la création, Boito, très meurtri par son échec, tira les leçons de l’incompréhension du public en remaniant profondément son livret qu’il allégea. La nouvelle version de Mefistofele, donnée en 1875 à Bologne, ville favorable à Wagner, connut enfin un succès qui perdure même si l’ouvrage n’est jamais entré dans le grand répertoire. Le rôle de Mefistofele, d’une puissance saisissante, fut chanté par les plus grandes basses : ainsi Fiodor Chaliapine fit ses débuts à la Scala en 1901 en incarnant le maléfique Mefistofele aux côtés de Caruso, en Faust, sous la direction de Toscanini.
Tout en se consacrant à la révision de son Mefistofele, Boito écrivit des livrets pour d’autres compositeurs comme Alfredo Catalani (1854-1893) ou Amilcare Ponchielli (1834-1886) pour lequel il conçoit La Gioconda (1876) sous le pseudonyme anagrammatique de Tobia Gorrio. Parallèlement, Boito poursuit une intense activité de traducteur avec les Wesendonck Lieder (1868) de Wagner, Der Freischütz (1872) de Weber, ou encore Tristan et Isolde (1876) de Wagner et Rousslan et Ludmilla (1876) de Glinka. Mais ces activités de librettiste et de traducteur n’empêchent pas Boito de continuer à travailler à son projet de Nerone qu’il a commencé à Paris en 1862.
En 1879, le fidèle Faccio et l’éditeur Giulio Ricordi parviennent à réconcilier Boito et Verdi. Commence alors une collaboration des plus fructueuses qui s’accompagnera d’une véritable amitié, effaçant toutes les dissensions passées. Verdi prendra soin d’associer son détracteur d’hier à ses nouveaux succès : la version révisée de Simon Boccanegra (1881), et les deux derniers chefs-d’œuvre que sont Otello (1887) et Falstaff (1893).Un dernier projet ne vit pas le jour, celui d’un Roi Lear. Boito sera terriblement affecté par la disparition de Verdi le 27 janvier 1901.
Alors qu’il est directeur du Conservatoire de Parme de 1889 à 1897, puis sénateur à partir de 1912, Boito continue à se consacrer sans relâche à son second opéra,Nerone, qu’il laissera inachevé. Il succombe à une crise cardiaque le 10 juin 1918 à Milan, où il est enterré.
Auteur de recueils de vers, de nouvelles, de livrets et de romans, Boito est un compositeur singulier, partagé entre musique et poésie. Mais son nom reste paradoxalement attaché à celui de Verdi qui lui vouait une sincère admiration, le remerciant d’avoir écrit pour lui un si « magnifique Falstaff ».
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