Si l’on suit attentivement les concours de chant, si l’on voyage un peu en dehors des grandes maisons du circuit lyrique traditionnel, on se rend compte qu’une floraison de voix nouvelles se lève à l’Est qui vont bientôt bousculer les hiérarchies et susciter très vite un enthousiasme du public. Le Théâtre Mariinski de Saint-Pétersbourg ou l’Opéra de Vienne les programment déjà régulièrement pour le bonheur des spectateurs de ces maisons. Pour donner des noms, je crois que les trois nouvelles stars chez les sopranos s’appellent Aïda Garifullina, Venera Gimadieva et Valentina Nafornita.
La première, Aïda Garifullina (dont les parents avaient assurément quelque idée derrière la tête pour prénommer leur fille Aïda !) a été révélée au monde lyrique en 2013 quand elle a remporté à 25 ans à Vérone le concours Operalia organisé par Placido Domingo.
Née à Kazan le 30 septembre 1987, dans une famille de musiciens (sa mère dirige le Centre de musique contemporaine Gubaidulina), la jeune Aïda a fait ses études musicales d’abord à Kazan puis en Allemagne et à Vienne (où, en 2009, elle a fait ses débuts en chantant Despina de Cosi fan tutte à l’Université de Vienne). Repérée à Londres en 2012 par Valey Gergiev lors d’un concert donné en marge des Jeux Olympiques, elle débute au Mariinsky en Susanna des Noces de Figaro puis Gilda de Rigoletto et Adina de L’Elixir d’amour. Et puis c’est Operalia, une tournée avec Domingo et, en 2015, un contrat que vient de lui signer Decca en même temps que Dominique Meyer l’invite en résidence à l’Opéra de Vienne. Elle fera ses débuts à Paris en avril 2017 dans le rôle-titre de… Snegourotchka : bien joué, Stéphane Lissner !
Venera Gimadieva, de trois ans plus âgée, est elle aussi native du Tatarstan et commence, elle aussi, ses études à Kazan puis à Saint-Pétersbourg, où elle rejoint très vite la troupe de l’Opéra de chambre de Saint-Pétersbourg qui la fait débuter en Gilda de Rigoletto et dans le rôle-titre de Lucia di Lammermoor.
Puis c’est au Bolchoï de Moscou qu’elle est vraiment découverte en chantant les premiers rôles de Snegourotchka, de La légende de la ville invisible de Kitège ou de La Fiancée du Tsar, trois opéras de Rimski-Korsakov. Sa carrière internationale débute quand, en 2014, on la découvre à la Fenice de Venise en Traviata. Ce seront ensuite le festival de Glyndebourne, l’Opéra de Paris (pour une brève reprise de Traviata en septembre 2014), et en 2015 puis 2016 Covent Garden, Berlin, Madrid : le nom de Venera Gimedieva est lancé.
Valentina Nafornita est peut-être la moins connue de ces trois nouvelles stars : elle est née à Glodeni en Moldavie, a fait ses études à Bucarest, a reçu le prix Joan Sutherland en 2011, a chanté Gilda de Rigoletto l’année suivante à la Scala et a commencé à sillonner l’Europe, en particulier l’Opéra de Vienne où elle a été engagée plusieurs fois durant la saison 2015/16, avant d’être invitée au Festival de Salzbourg pour Zerlina de Don Giovanni.
Pour elle aussi, l’avenir est assuré. Les heureux voyageurs qui se rendront à Vienne en avril pour un week-end lyrique exceptionnel auront la chance de l’entendre donner la réplique à Juan Diego Florez en Norina de Don Pasquale !...
D’autant que, comme ses deux consoeurs, elle joint le plumage au ramage : à l’heure où, après la télévision, c’est au cinéma qu’on découvre (de près) les nouvelles stars du chant, il est utile de posséder, outre l’indispensable talent artistique, une plastique de star de l’écran : c’est le cas de ces trois jeunes divas qu’on va beaucoup entendre et voir durant les années qui viennent.
par Alain Duault
15 février 2016 | Imprimer
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