C’est avec tristesse que nous apprenons ce matin la disparition de Nicolas Joel, survenue hier soir, à l’âge de 67 ans.
Né à Paris le 6 février 1953, il y effectue ses études avant de partir à l’Opéra nationale du Rhin à Strasbourg en tant qu’assistant metteur en scène, fonction qu’il exerce non seulement dans cette ville mais aussi aux festivals de Bayreuth et de Salzbourg, et au San Francisco Opera jusqu’en 1978. L’année suivante, il prend son envol en tant que metteur en scène avec une production du Ring de Wagner pour l’OnR et pour l’Opéra de Lyon. Trois ans plus tard, on le retrouve sur le continent américain avec Samson et Dalila où il dirige notamment Shirley Verrett et Placido Domingo à San Francisco ou enore Aïda avec Luciano Pavarotti à San Francisco, Chicago et Toronto. Il poursuit ensuite sa carrière de metteur en scène dans les opéras du monde entier : l’Opéra de Vienne, Copenhague, Zürich, Lausanne (où il travaille notamment sur la Tosca qui voit les débuts de José van Dam en Scarpia), la Scala de Milan, le Covent Garden, le Teatro Colón de Buenos Aires, le Teatro Real de Madrid, entre autres.
En 1996, il fait son entrée au Metropolitan Opera de New-York avec une nouvelle production d'Andrea Chénier dans laquelle il retrouve Luciano Pavarotti dans le rôle-titre. Il reviendra deux ans plus tard avec Lucia di Lammermoor, avant de retourner à la Scala de Milan en 1999 pour une nouvelle production de Manon et de poursuivre avec brio sa carrière internationale.
Le public français profite lui aussi de son travail, réputé pour sa minutie et son classicisme. On le retrouve ainsi à Nice, à Montpellier, à Nancy, mais aussi aux Chorégies d’Orange à de nombreuses reprises entre 1987 (avec Le Vaisseau fantôme) et 2005 (La Bohème). Ce sont toutefois deux autres maisons françaises qui marqueront un rôle prédominant dans sa carrière : le Théâtre du Capitole de Toulouse et l’Opéra de Paris.
Il est en effet directeur artistique du premier de 1990 à 2009, et signe durant cette période de nombreuses nouvelles productions (Falstaff, Le Trouvère, Elektra, Rigoletto ou Roméo et Juliette avec Roberto Alagna). Il présente également une nouvelle production de Louise de Charpentier et de Werther en 1996 (production par ailleurs reprise en 2019), à l’occasion de la réouverture du Théâtre du Capitole, ainsi qu’une nouvelle production de Jenůfa en 2004 pour la réouverture de la salle après la rénovation de la cage de scène. Parmi ses derniers engagements, citons La Rondine, reprise un peu partout dans le monde et donné à nouveau à Toulouse en 2017.
Lorsqu’il quitte la ville en 2009, c’est pour remonter dans sa ville natale et prendre les rênes de l’Opéra national de Paris à la suite de Gérard Mortier. Trois ans plus tard, la maison enregistre un taux de fréquentation record et connaît un important renouvellement du public, mais annonce début octobre ne pas souhaiter poursuivre et candidater à sa propre succession après avoir « appris la trajectoire budgétaire de l’Opéra pour les prochaines années. C’est-à-dire une baisse des subventions de 2,5 % en 2013, autant en 2014 et en 2015 ». Stéphane Lissner est alors nommé à sa suite, et prendra ses fonctions en août 2014, soit un an avant la fin initialement prévue du mandat de Nicolas Joel.
Sa disparition fait ainsi un triste écho à la situation actuelle de l'Opéra de Paris, financièrement et socialement très touché par les crises sociales et sanitaires actuelles, et qui donne lieu au départ prématuré de celui qui lui avait succédé...
19 juin 2020 | Imprimer
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