« Laissez-vous émerveiller » en 2023-2024 à l’Opéra de Saint-Etienne

Xl_op_ra_de_saint-etienne_2023_2024 © Opéra de Saint-Etienne

Alors que l’Opéra de Saint-Etienne vient de clore sa saison avec Macbeth, nos regards se tournent déjà vers la saison 2023-2024 qui promet elle-aussi de beaux rendez-vous. Si la maison rencontre les mêmes difficultés que l’ensemble des théâtres lyriques, elle semble néanmoins réussir à ne pas en impacter trop fortement sa programmation avec une baisse à peine perceptible du nombre de levers de rideaux, la suppression du concert de lancement de saison, et un nombre de productions lyriques seulement « réduit » à cinq (une sixième était envisagée si le contexte économique avait été plus favorable). Toutefois, tous les titres proposés seront des nouvelles productions. Une conséquence positive du Covid, puisque les reprises ou reports de la saison dernière ont pu libérer du temps d’atelier, pour permettre à la maison stéphanoise de nous inviter à « nous laisser nous émerveiller »…

Deux raretés

C’est par un événement que s’ouvrira cette saison, avec La Esmeralda de Louise Bertin dont le livret inspiré de Notre Dame de Paris fut écrit par Victor Hugo lui-même. Créée en 1836, l’œuvre fit alors polémique pour des raisons politiques, mais aussi sociétales : la compositrice, atteinte d’un handicap moteur, fut décriée par la critique de l’époque qui lui dénia la capacité de composer une œuvre d’envergure. Louise Bertin semble ainsi « avoir trouvé un double fictionnel dans le personnage d’Esmeralda, harcelée et méprisée par un groupe d’hommes qui ne peuvent tolérer sa liberté ». Ici, « le livret d’Hugo nous fait revenir à la source de l’histoire : le récit d’une femme, étrangère, désirée par un Phœbus belliqueux et un prêtre perfide, victime d’agression sexuelle et qui se retrouve coupable ». Dans sa mise en scène, Jeanne Desoubeaux souhaitera « redonner la place aux mots d’Hugo ». Selon la présentation proposée par l’Opéra, « tout reposera sur la puissance vocale et théâtrale des chanteurs, l’intelligence dans l’écriture des situations et la portée contemporaine du propos », avec une volonté affirmée de « faire circuler l’énergie des corps en scène et la bestialité des rapports hommes-femmes dans cet opéra. » La metteuse en scène rebondira également sur la catastrophe qui a touché Notre-Dame, et le décor sera notamment composé d’échafaudages afin de replacer l’action durant la reconstruction. Sous la direction de Benjamin d’Anfray, l’ensemble Lélio fera revivre la musique de Louise Bertin sur des instruments d’époque. Jeanne Mendoche incarnera cette héroïne emblématique face au Phoebus de Martial Pauliat, le Frollo de Renaud Delaigue, le Clopin d’Arthur Daniel et le Quasimodo de Christophe Crapez. Avant de partir en tournée dans les différentes maisons coproductrices, le spectacle sera donc créé au au Théâtre Copeau dont les dimensions sont plus adaptées à la taille de cette production que celle du Théâtre Massenet.

Autre (re)découverte du répertoire, Le Tribut de Zamora, ultime œuvre lyrique de Gounod dont la partition « est claire, limpide, mélodieuse, d’une grande unité de style ; elle contient des pages charmantes de grâce et de sentiment, à côté de morceaux d’une rare puissance », selon les mots de Victorin de Joncières. L’action se situe au IXe siècle, dans le califat de Cordoue, dans une Espagne alors dominée par les Maures. Ben-Saïd, le représentant du calife, empêche le mariage du soldat Manoël avec la belle Xaïma, dont il tombe amoureux. Hervé Niquet dirigera cette coproduction avec le Palazzetto Bru Zane, dont la mise en scène sera signée par le même Gilles Rico à l’origine d’une Auberge du Cheval blanc « tout en finesse » qui nous avait séduit en début d’année à Marseille. Ce dernier fera ainsi ses débuts à l’Opéra de Saint-Etienne. Habitué des lieux, Jérôme Boutillier incarnera Ben-Saïd aux côtés de Chloé Jacob dans le rôle de Xaïma. Ils seront rejoints par Elodie Hache (Hermosa), Clémence Barrabé (Iglésia) – « remarquable Donna Anna » ici-même en 2019 –, le très talentueux Mikhail Timoshenko (Hadjar, le Roi), Kaëlig Boché (L’alcade Mayor, le Cadi), ou encore Léo Vermot-Desroches (Manoël) que nous venons justement d’entendre sur cette même scène dans Macbeth.

Des classiques du répertoire italien

La délocalisation évoquée plus haut de La Esmeralda permettra de donner le même mois, dans la salle habituelle, Il Trovatore mis en scène par Louis Désiré. Antonio Corianò tiendra le rôle de Manrico, Ernesto Petti celui du Comte de Luna, Kamelia Kader en Azucena, et ni plus ni moins qu’Angélique Boudeville en Leonora. Cette dernière devrait particulièrement ravir le public qui répondra présent, à n’en pas douter.

L’autre grand classique italien de la programmation sera La Bohème, en juin, dans la mise en scène d’Eric Ruf actuellement donnée au Théâtre des Champs-Elysées avec qui la maison est en coproduction. La distribution sera toutefois différente, avec Gabrielle Philiponet dans le rôle de Mimi, et qui retrouvera le public stéphanois qui l’avait déjà entendue dans Le Marchand de Venise en 2015. Matteo Desole sera pour sa part Rodolfo, Perrine Madoeuf une Musetta de luxe, et Andrea Vincenzo Bonsignore, Marcello.

Une oeuvre française

Entre grand répertoire italien et raretés, l’Opéra de Saint-Etienne proposera également Les Pêcheurs de perles de Bizet. Le titre devait à l’origine être donné durant la pandémie, dans une production louée. Après avoir constaté l’engouement du public pour l’achat des places à ce moment-là, la maison a décidé de ne pas le priver du titre mais dans une production maison, puisque cela était rendu possible. La mise en scène sera signée par Laurent Fréchuret, un metteur en scène de théâtre stéphanois qui a déjà collaboré avec l’ancienne direction de l’Opéra et qui nous promet de l’émerveillement. Eric Blanc de la Naulte, le directeur de l’Opéra, livre en interview que « ce ne sera pas une vision très classique, mais elle devrait faire rêver le public ». Sous la direction de Guillaume Tourniaire, le plateau réunira Catherine Trottmann (Leïla), Kévin Amiel (Nadir), Philippe-Nicolas Martin (Zurga), et Frédéric Caton (Nourabad).

Enfin, Jérôme Boutillier sera également présent pour un récital le 20 mars et nous invitera à l’accompagner pour le Voyage d’Hiver, un « voyage intérieur, au gré des vingt-quatre poèmes de Wilhelm Müller que vous entendrez ici dans l’ordre poétique de leur composition, nimbés de la musique d’un Schubert seul et malade qui, alors dans la dernière année de sa vie, chargea son œuvre de son plus fort désir d’absolu ».

Entre classiques et raretés, l’Opéra de Saint-Etienne nous invite donc à nous émerveiller en 2023-2024. Une invitation qui se traduit par de belles promesses, qu’il nous tarde de découvrir.

Plus d’informations sont disponibles sur le site officiel de l’Opéra de Saint-Etienne.

Elodie Martinez

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