Infatigable malgré ses 97 ans, immuablement au service exclusif de la musique, le chef Herbert Blomstedt est de retour au Festival de Salzbourg dans le cadre des concerts « Ouverture Spirituelle » pour diriger l’Orchestre philharmonique de Vienne dans un programme rare réunissant Brahms et Mendelssohn.
Qui pourra faire mieux ? À 97 ans et au terme d’une carrière sans précédent, le chef est toujours au pupitre d’un orchestre, qu’il dirige debout ou assis – plus régulièrement assis, dorénavant. Herbert Blomstedt, puisque c’est de lui dont il s’agit, est et reste une exception parmi les grands chefs d’orchestre en activité : toujours imperturbable, résolument modeste et immuablement au service exclusif des œuvres qu’il dirige. Malgré son grand âge, ce fils de parents suédois naturalisé Américain, a en outre toujours de nombreux projets à venir, incluant plusieurs représentations prévues à Leipzig et Berlin cette année ou encore à Munich en janvier de l’année prochaine. Et aujourd’hui dans le cadre du Festival de Salzbourg, on a pu entendre le Maestro à la tête du premier concert de l'Orchestre philharmonique de Vienne, dans un Großen Festspielhaus – devant une salle comble à deux reprises avec ce même programme, ces 28 et 30 juillet.
Le programme débute avec le « Schicksalslied » (Le chant du destin) de Johannes Brahms d'après un poème de Friedrich Hölderlin. L’ouvrage décrit la différence entre l'existence céleste et l'existence terrestre : là-bas, un repos bienheureux dans des hauteurs lumineuses ; ici, une errance sans repos et une chute dans l'inconnu. Un contraste idéal pour une mise en musique. Sous la direction serrée de Herbert Blomstedt, à la gestuelle toujours minimaliste, l'Orchestre philharmonique de Vienne retranscrit à merveille l'atmosphère musicale tantôt calme, suspendue et en même temps pleine de nostalgie du Ciel ; tantôt celle infiniment plus sombre, menaçante et rythmée de la Terre. À leur côté, le Singverein de Vienne préparé par Johannes Prinz fait une fois de plus la démonstration de son niveau artistique.
„Alles, was Odem hat, lobe den Herrn“ (« Que tout ce qui a du souffle loue le Seigneur »). Comme un leitmotiv, le thème retentit dans toute sa noblesse, porté dès l’ouverture par les cors, trompettes et trombones de l’orchestre avant d’être repris par un chœur éclatant, pour finalement s’achever de façon hymnique dans un finale réunissant l’ensemble des chœurs et de l’orchestre. C’est le cœur de la deuxième partie de cette matinée de concert, la deuxième symphonie de Felix Mendelssohn Bartholdy, dite « Lobgesang » (Chant de louange), « symphonie-cantate » reposant sur des textes extraits de l'Écriture sainte, et dont la structure rappelle le modèle de la « Neuvième » de Beethoven.
Sous la battue de Herbert Blomstedt, l'Orchestre philharmonique de Vienne dépeint une fresque aux couleurs somptueuses : chaque phrase est savourée, dans une grande expressivité mélodique et un raffinement des couleurs, toujours riche de tension et ponctuée de quelques touches dramatiques.
L'excellent chœur, ici pléthorique, se révèle homogène, puissant, mais aussi subtil et d'une grande beauté sonore. Les trois solistes s’avèrent tout aussi exquis : Tilman Lichdi, diction exemplaire et beau ténor expressif pour déployer toute la puissance du texte. Les interprètes féminines sont certes un peu moins limpides : Christina Landshamer débute la soirée avec un peu trop de vibrato mais son soprano est clair, tandis que la deuxième soprano, Elsa Benoît, offre une interprétation riche de finesse.
Les deux œuvres sont vivement et chaleureusement applaudies par un public manifestement enthousiaste !
traduction libre de la chronique en allemand d'Helmut Christian Mayer
01 août 2024 | Imprimer
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