À l’occasion de l’année bicentenaire de Giuseppe Verdi et Richard Wagner, l’édition 2013 du Festival de Salzbourg – qui rend traditionnellement hommage depuis 1920 à la musique de Mozart – consacre une large place au répertoire des deux géants de l’art lyrique dont on commémore cette année la naissance. Et si les deux compositeurs affichent des univers radicalement différents, Alexander Pereira, directeur artistique du festival pour la deuxième année consécutive, compose un programme mettant en lumière les influences communes et les convergences qui rapprochent les deux artistes du XIXe siècle.
« Notre intention consiste notamment à explorer les influences communes que Richard Wagner et Giuseppe Verdi partagent, quand bien même ils apparaissent aux antipodes l’un de l’autre. Wagner comme Verdi tenaient ainsi Bellini et Meyerbeer en haute estime, par exemple, et furent tout autant des admirateurs fervents de Friedrich Schiller. Wagner a décrit les œuvres de Schiller comme « les bases du drame musical par excellence » au motif qu’ils étaient « pleinement animés par la musique », et dès l’âge de dix-sept ans, en hommage, il composait une ouverture à l’œuvre de Schiller, Die Braut von Messina. De son côté, Verdi a signé quatre opéras inspirés des travaux de Schiller dont le premier, Giovanna d’Arco, dès 1845. Le Rienzi de Wagner, qui date de 1842 et qui fut décrit plus tard par Hans von Bülow comme le « meilleur opéra de Meyerbeer », sera présenté en version concertante, parallèlement aux deux opéras de jeunesse de Verdi, Giovanna d’Arco et Nabucco (1842). Cet ensemble d’opéras en concert devrait offrir une fascinante occasion de comparer les œuvres écrites par les deux compositeurs aux mêmes âges, toutes trois articulées autour de thèmes similaires – la liberté, l’orgueil et la destruction. »
Et comme de coutume à Salzbourg, le Festival promet des distributions à la hauteur de l’événement.
On pourra assister à un Die Meistersinger von Nürnberg mis en scène par le norvégien Stefan Herheim – sacré trois fois « metteur en scène de l’année » par le magazine lyrique allemand Opernwelt, notamment pour son Parsifal à Bayreuth. Parmi la longue distribution qui compose la production, on retrouve Michael Volle, Roberto Saccà, Markus Werba ou encore Anna Gabler, dirigés par le grand Daniele Gatti.
La version concert de Rienzi (Wagner) n’est pas en reste, dirigée par Philippe Jordan, avec Sophie Koch, Benjamin Bernheim, Christopher Ventris…, qui fait écho à Nabucco (Verdi) sous la baguette de Riccardo Muti, avec Željko Lučić, Dmitry Belosselskiy et Tatiana Serjan…. Là encore une double approche mise en perspective par Alexander Pereira qui souligne l’impact politique des deux œuvres dans la propagande de leur pays respectif.
Le second concert Verdi, Giovanna d’Arco, dirigée par Paolo Carignani, bénéficie d’une distribution à ne pas manquer : Placido Domingo en Giacomo, Anna Netrebko en Jeanne d’Arc, Francesco Meli en Carlo VII et Roberto Tagliavini en Talbot. Un concert également mis en perspective avec la Jeanne d’Arc de Walter Baunfels avec notamment Bryan Hymel et Pavol Breslik.
Quant aux opéras verdiens, le programme du Festival promet deux monuments du compositeur italien : Falstaff et Don Carlo. Et c’est évidemment Ambrogio Maestri qu’on retrouve dans son rôle-titre fétiche de Falstaff, qui donnera la réplique à Massimo Cavalletti ou encore Javier Camerena, sous la baguette du célèbre chef d’orchestre Zubin Mehta. Et on comprendra tout autant l’impatience des mélomanes quant à Don Carlo, au regard d’une distribution renversante dirigée par Antonio Pappano : Jonas Kaufmann, Anja Harteros, Thomas Hampson, Ekaterina Semenchuck, Matti Salminen, Sen Guo...
Mais au-delà de Wagner et Verdi, c’est cependant Gawain, l’opéra d’Harrison Birtwistle, qui ouvre les festivités (en lieu et place de l’œuvre de György Kurtág, commandée pour l’occasion, mais qui ne sera pas achevée pour l’ouverture du festival). On (re)découvrira donc cet opéra contemporain basé sur le poème épique britannique Sir Gawain and the Green Knight, confié à la baguette d’Ingo Metzmacher avec notamment Christopher Maltman dans le rôle principal, John Tomlinson ou encore Laura Aikin.
L’incontournable Mozart est par ailleurs à l’honneur à Salzbourg. Deux opéras sont proposés cette année (en plus de plusieurs concerts), là encore mis en perspective. D’abord Lucio Silla composé par Mozart alors qu’il n’a que seize ans, dans une production déjà vue à l’occasion de la Semaine Mozart 2013, avec Rolando Villazon dans le rôle-titre donnant la réplique à Eva Liebau et Olga Peretyatko, sous la baguette de Marc Minkowski. Puis l’incontournable Cosi Fan Tutte, opéra de la maturité pour Mozart, avec Malin Hartelius en Fiordiligi, Luca Pisaroni en Guglielmo et Gerald Finley en Don Alfonso, dirigés par Christoph Eschenbach.
Enfin et non des moindres, la production de Norma donnée lors du Festival de Pentecôte en avril dernier, largement ovationnée par le public et la critique, avec Cecilia Bartoli dans rôle-titre, vient compléter une programmation déjà très fournie et à la hauteur des ambitions du Festival de Salzbourg.
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