Création de La Falaise des lendemains, « opéra d’aujourd’hui »

Xl_zoom-sur_la-falaise-des-lendemains_jean-marie-machado-2024b © La Falaise des Lendemains

Ce 7 novembre, l’Opéra de Rennes accueillera la création de La Falaise des lendemains, premier opéra de Jean-Marie Machado. Musicien de jazz, improvisateur et compositeur, il signe un « opéra d’aujourd’hui » aux allures de conte à la fois sombre et porteur d’espoir, qui puise son inspiration à la fois dans la culture celtique et les musiques ibériques. 

L’opéra est un art vivant. Les maisons d’opéra commandent de nouvelles œuvres pour faire évoluer leur répertoire, les compositeurs s’en saisissent pour faire évoluer l’écriture musicale du genre opératique et ces ouvrages vivent ensuite au gré des interprétations et des productions des metteurs en scène. Ce 7 novembre, La Falaise des lendemains fera l’objet d’une création à l’Opéra de Renne, et comme pour illustrer la vivacité des scènes lyriques, son compositeur Jean-Marie Machado présente l’ouvrage non pas comme un opéra contemporain, mais comme un « opéra d’aujourd’hui ». Un opéra se nourrissant des envies et des influences musicales très diverses du compositeur, qui puisent autant dans les musiques ibériques que la tradition bretonne.

Une attente d’opéra

On connait d’abord Jean-Marie Machado comme musicien de jazz, improvisateur et compositeur notamment pour ses propres ensembles. Il cultivait néanmoins l’envie d’intégrer des voix aux côtés de ses musiciens et souhaitait depuis longtemps composer un opéra. Le projet se concrétisera grâce à une rencontre avec Matthieu Rietzler alors directeur de l’Opéra de Rennes, et Alain Surrans, le directeur d’Angers Nantes Opéra. Les deux directeurs lui commandent une œuvre lyrique, il s’attelle à la composition de La Falaise des lendemains.

Il faut dire ici que Jean-Marie Machado cultive un goût pour l’échange et les rencontres, et l’opéra est par nature une œuvre collective. La création de l’ouvrage débute donc avec le librettiste Jean-Jacques Fdida, avec qui il avait déjà collaboré autour du conte musical Peau d’ânesse. Ils imaginent un livret aux allures de conte cruel et poétique, empreint de culture celtique, voire presque fantastique, mais qui revendique aussi des « références à l’opéra vériste du début du XXe siècle », en ce sens que l’ouvrage « mêle passion et violence amoureuses ».

Un opéra aux allures de conte cruel et poétique

L’ouvrage se déroule pendant la Grande Guerre et la Falaise des lendemains est ce lieu où les deux principaux protagonistes, Lisbeth et Chris, doivent se retrouver. Elle est infirmière, il est marionnettiste, et c’est un coup de foudre.

Le cruel Dragon a néanmoins des vues sur Lisbeth. Il laissera Chris presque mort, défiguré et amnésique. Lisbeth préférera se jeter de la falaise plutôt que de céder aux avances brutales de Dragon ; elle en réchappera, mais en y laissant l’usage de ses jambes. Et si Dragon s’échine à les séparer, le destin s’acharne à les réunir – le livret est sombre, mais porteur d’espoir. On en trouve le détail, acte par acte, dans notre Encyclopera.

L’action de La Falaise des lendemains se déroule entre Roscoff et l’île de Guernesey. C’est ce paysage qui détermine d’abord la musique de Jean-Marie Machado pour dessiner la couleur de l’opéra. D’abord, « la composante celtique est allée de soi ». Et puis « l’influence de l’Espagne et du Portugal » qui accompagne le compositeur de longue date, « mais ici, elle va être relativisée par une inspiration des musiques d’aujourd’hui », jusqu’à devenir une « œuvre de jazz diskan opéra ». Le compositeur s’explique dans un échange publié par Angers Nantes Opéra.

Un tourbillon musical et scénique

Diskan, un contre-chant, « c’est cette phrase qui se passe en relais » : « si, dans ma composition j’amène le jazz, il y a un contre-chant avec une autre musique qui apparaît. L’idée, c’était donc de faire ce passage entre le jazz, le monde celtique et le monde opératique ». Il poursuit : « tout interagit comme dans un tourbillon : le jazz, les traditions, l’écrit, les instruments, les voix, le théâtre, la danse, la musique, le texte, et tout cela va entrer en mouvement ». Le compositeur est aussi sensible à la musique des mots et des langues. Son opéra est écrit en français, anglais et breton.

Et pour donner vie à ce « tourbillon », la création s’appuiera sur une distribution bigarrée : les personnages viennent de mondes différents et les chanteurs sont donc aussi issus d’univers musicaux distincts. Certains sont issus de conservatoires, comme Yete Queiroz dans le rôle de Lisbeth, ou Karine Serafin, Florian Bisbrouck et Cécile Achille. D’autres, comme Florent Baffi dans le rôle posé et protecteur de Malo, sont issus de la musique baroque. D’autres encore ont fait leurs armes dans le théâtre musical (Gilles Bugeaud) alors que la chanteuse de musique celtique Nolwenn Korbell prêtera ses traits à l’intraitable Maureen. Selon le compositeur, « certains personnages sont  très lyriques, d’autres parlent davantage ou chantent des sortes de récitatifs ».

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Les voix au cœur de l’orchestre, ou l’inverse

Comment orchestrer cette diversité ? C’est ici qu’entre en scène Jean Lacornerie, le metteur en scène de la création de l’ouvrage. L’opéra contemporain à cet avantage de permettre aux compositeurs et metteurs en scène de travailler ensemble. Et Jean Lacornerie a été associé très tôt au projet, alors même que la partition était encore en cours de composition. Il a ainsi pu travailler avec Jean-Marie Machado et notamment appréhender l’importance de l’orchestre – l’ouvrage sera interprété par l’Ensemble Danzas, orchestre créé il y a quinze ans par Jean-Marie Machado.

L’ouvrage s’articule autour de trois époques et de différents lieux. Comment en rendre compte scéniquement ? Dans la Falaise des lendemains, c’est la musique qui dessine les atmosphères et les paysages de l’ouvrage. Selon le metteur en scène, « il n’y avait donc pas besoin de représenter ce qui est déjà donné par la musique ». Il fait le choix de placer les musiciens sur le plateau, au cœur du dispositif scénique : « la mise en scène ne consistera pas à planter un décor mais à circuler dans le paysage sonore de l’orchestre pour libérer l’énergie lyrique du drame ». L’orchestre est un acteur à part entière de l’ouvrage qui assiste et participe au récit, alors que musiciens et chanteurs ont vocation à interagir sur scène.

La Falaise des lendemains revendique des influences musicales très diverses, sur un livret qui puise autant dans le conte que le drame vériste, défendu sur scène par des interprètes aux horizons variés, et qui prendra vie dans une mise en scène très ouverte qui entend s’affranchir de certains des codes traditionnels de l’art lyrique. Un « opéra d’aujourd’hui » en somme. 

La Falaise des lendemains fera l’objet d’une création à l’Opéra de Rennes ce 7 novembre. L’ouvrage sera ensuite repris à l’Atelier Lyrique de Tourcoing le 18 janvier 2025, à la Maison des Arts de Créteil le 24 janvier, puis à Angers Nantes Opéra au Théâtre Graslin de Nantes du 26 février au 1er mars 2025 et au Grand-Théâtre d’Angers le 24 avril de la même année.

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La Falaise des Lendemains de Jean-Marie Machado :

  • samedi 26 octobre à 14h30)
  • Le 18 janvier 2025 au Théâtre de Tourcoing, Académie lyrique de Tourcoing
  • Le 24 janvier 2025 à la Maison des arts et de la culture de Créteil
  • Les 26, 27 et 28 février, et 1er mars 2025 au Théâtre Graslin de Nantes (Angers Nantes Opéra)
  • Le 24 avril 2025 au Grand-Théâtre d'Angers (Angers Nantes Opéra)
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