La soprano italienne Gigliola Frazzoni s’est éteinte ce samedi 3 décembre à Bologne après avoir connu une superbe carrière et avoir suscité l'admiration de celles et ceux qui ont eu la chance de l’entendre, elle qui parvint à se faire un nom aux côtés de ceux de Maria Callas ou de Renata Scotto.
Gigliola Frazzoni naît à Bologne le 22 février 1927 dans une famille dans laquelle la musique était un membre à part entière et où le père aimait à jouer de la guitare accompagné du chant par ses enfants. C’est donc assez naturellement que la jeune fille de l’époque débute les cours de chant, encouragée par Valeria Manna (Pesaro 1897 – Bologne 1974), chanteuse lyrique et ancienne voisine de la famille. Et sa voix « naturellement posée » se fit tout de suite remarquer, alors qu'elle remporte de nombreux concours.
Le 4 octobre 1947, alors âgée de seulement 20 ans, elle fait ses débuts au Teatro di Pesaro dans Francesca da Rimini dans le rôle d’une Samaritaine sous la baguette de Tullio Serafin (Rottanova di Cavarzere 1 septembre 1878 – Rome 2 février 1968). L’année suivante, elle est Mimi dans La Bohème au Teatro Duse de Bologne aux côté de son ami Anselmo Colzani. Le succès débute dès ses premières apparitions et c’est tout juste si l’on ne se bouscule pas déjà aux portes des théâtres pour l’entendre.
En 1949, seulement deux ans après ses tout premiers pas sur scène, elle est invitée dans la production de Carmen auprès du grand ténor Mario del Monaco (Florence, 27 juillet 1915 – Mestre, Vénétie, 16 octobre 1982). Elle enchaîne ensuite les grands opéras, comme Andrea Chénier, Pagliacci ou Cavalleria rusticana ainsi qu’une tournée de 38 dates en Afrique du Sud. A son retour en Italie, elle inaugure la saison de l’opéra de Parme puis remporte un vif succès à Zurich avec son interprétation de Madame Butterfly, reprise par ailleurs à Turin, Livorno, Venise, Parme, Palermo, Rome et Milan. A la fois réputée pour sa voix et son tempérament, le public n’est jamais déçu et c’est encore avec succès qu’elle interprète Aida au Caire et à Alexandrie avant de partir en Hollande pour Il Trovatore.
1955 est une année importante pour Gigliola Frazzoni puisque c’est cette année-là qu’elle prête sa voix au personnage de Minnie dans La Fanciulla del West. Le succès fut tel que l’opéra fut joué 18 fois uniquement cette année avant qu’elle ne reprenne le rôle le 4 avril de l’année suivante à La Scala avec Franco Corelli (Ancône 8 avril 1921 – Milan 29 octobre) et Tito Gobbi (Bassano del Grappa 24 octobre – Rome 5 mars 1984) sous la baguette d’Antonio Votto (30 Octobre 1896 – 9 Septembre 1985), dix ans après que l’œuvre eut été montée dans cette même salle. Toujours en 1956, le maestro Votto appelle Frazzoni dans la maison milanaise pour remplacer Maria Callas dans le rôle de Madeleine de Coigny dans Andrea Chénier.
Le 26 janvier 1957, La Scala donne la Première mondiale du Dialogues des carmélites de Poulenc où elle crée le rôle de la Mère Marie. Elle n'a pas encore 30 ans et déjà dix années de carrières derrière elle, ce qui ne l’empêche pas de remporter une nouvelle fois un vif succès. En 1960, elle reprend le rôle de Minni lors des représentations de La Fanciulla del West données dans les bains de Caracalla durant les Jeux Olympiques de Rome. C’est en 1979, alors âgée de 52 ans, qu’elle donne sa dernière représentation dans Cavalleria rusticana aux arènes de Vérone. Après avoir mis fin à sa carrière lyrique, elle participe en tant qu’actrice en prose à Spoleto sous la direction de Lina Wertmuller et poursuit sa carrière artistique dans la peinture tout en dirigeant et collaborant avec différentes écoles de chant.
Son plus grand « malheur » fut finalement sans doute d’avoir à rivaliser avec de plus grands noms encore que nous connaissons aujourd’hui, tels que Callas, Tebaldi ou Scotto. C'est toutefois bel et bien une grande artiste, souvent attachée au vérisme, que l'art lyrique a perdu samedi dernier.
06 décembre 2016 | Imprimer
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