Décès de Suzy Delair

Xl_delair © DR

Dimanche s'est éteinte l'une des grandes dames françaises, alors doyenne des comédiennes avec ses 102 ans : Suzy Delair, actrice mais aussi danseuse, chanteuse, reine de l'opérette et des revues de music-hall, véritable muse des années 1940 et 1950.

De son vrai nom Suzanne Pierrette Delaire, on la connut d'abord en tant qu'actrice marquante des années 1940-1950 durant lesquelles elle marqua les personnages phares des plus grands succès populaires : Pattes Blanches, Lady Paname, Le Couturier de ces Dames, Si Paris nous était conté, Rocco et ses Frères, sans oublier Atoll K aux côtés du célèbrissime duo Laurel et Hardy ou encore son interprétation de Gervaise dans l'adaptation cinématographique de L'Assommoir d'Emile Zola. Artiste aux multiples talents, elle quitta l'écran – qu'elle retrouvait toutefois ponctuellement – pour la scène où elle s'illustra notamment dans l'opérette.

Née à Paris le 31 décembre 1917 d'une mère couturière et d'un père sellier-carrossier, elle débute sa vie professionnelle en tant qu'apprentie-modiste chez Suzanne Talbot tout en rêvant de théâtre, ce qui l'amène à faire de la figuration au cinéma et au théâtre durant son adolescence. Toutefois, douée de véritables talents de chanteuse, c'est au music-hall qu'elle connaît dans un premier temps le succès, notamment aux Bouffes-Parisiens, à Bobino, à l'Européen, ou aux Folies-Belleville. Il faut alors attendre dix ans pour la découvrir au cinéma en Parisienne délurée dans Le Dernier des six (en 1941), réalisé par Georges Lacombe sur un scénario de Henri-Georges Clouzot. Elle retrouvera ce dernier l'année suivante lorsqu'il lui proposera, cette fois-ci en tant que réalisateur, un rôle qui deviendra l'un de ses grands succès dans le désormais classique L'assassin habite au 21. Toutefois, sa carrière est ensuite quelque peu troublée durant l'Ocuppation, et on lui reprochera son attitude sympathisante avec les Allemands. Elle écopera par ailleurs d'une suspension de trois mois infligée par les comités d'épuration.


Pochette de disque de Suzy Delair ; © DR

Plus tard, elle enchaînera les films, dont Quai des Orfèvres où l'on retrouve sa fameuse chanson du "tralala", et chantera "C'est si bon" en 1948 devant Louis Armstrong – qui la reprendra pour en faire le tube mondial que nous connaissons aujourd'hui – lors du premier Nice Jazz Festival. Ainsi, parallèlement à sa carrière d'actrice, elle n'hésite pas à poursuivre dans la chanson et se trouve, durant la saison 1953-1954, à l'Européen de Paris dans l'opérette Mobylette, avec pour partenaires Mona Monick et ceux qui sont alors encore débutants : Michel Roux, Roger Lanzac, et Lucien Lupi.

Elle s'illustra particulièrement dans l'opérette, et l'on retiendra sa merveilleuse interprétation de La Vie parisienne dans la célèbre version de la compagnie Renaud-Barrault. Métella hors-pair en 1958, elle renouvelle l'exploit dix ans plus tard dans La Périchole au Théâtre de Paris, mettant tout le monde d'accord pour la définir comme une offenbachienne exceptionnelle. Son talent s'étend toutefois au-delà du répertoire de ce seul compositeur et on la retrouve également dans les oeuvres d'Oscar Straus (Les Trois valses), ou d'André Messager (Véronique).

En 1973, le public la retrouve dans son dernier grand film aux côtés de Louis de Funès dont elle joue l'épouse dans Rabbi Jacob. Elle se retire dans les années 2000 et reçoit en 2006 l'insigne d'officier de la Légion d'honneur des mains de Renaud Donnedieu de Vabres, en présence notamment de Roger Hanin, puis fête l'année suivante ses 90 ans au Fouquet's en présence de ses amis. En 2017, elle fêtait ses 100 ans de manière plus discrète mais toujours avec grande lucidité. Sa disparition fait à présent de Renée Simonot (accessoirement mère de Catherine Deneuve) la nouvelle doyenne des actrices françaises, et laisse un important héritage artistique.

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