Quelle place pour l’opéra contemporain dans la fréquentation du Metropolitan Opera ?

Xl_metropolitan-opera-opera-contemporain © Metropolitan Opera

Le Metropolitan Opera de New York multiplie les productions d’opéras contemporains afin de renouveler son public. Le pari est-il réussi ? Si les œuvres de répertoire affichent encore les taux de fréquentation les plus élevés, les ouvrages contemporains attirent 25% des nouveaux spectateurs et contribuent à rajeunir le public.

Renouveler le public est aujourd’hui l’un des enjeux de taille de nombreuses maisons d’opéra et l’une des pistes explorées pour y parvenir consiste à programmer, voire commander des œuvres inédites. Le Metropolitan Opera s’y emploie depuis maintenant quelques saisons, et le taux de fréquentation des productions de la maison new-yorkaise permet de tirer un premier bilan de cette politique.

Au terme de la saison qui s’achève, le Met Opera annonce un taux de remplissage de 72%. Le chiffre n’est pas encore au niveau des résultats enregistrés avant la pandémie (le taux de remplissage était de 75% pour la saison 2018-19), mais se révèle néanmoins meilleur que les 66% de places vendues lors de la saison 2022-23.

Selon le directeur Peter Gelb, dont les propos sont rapportés par Associated Press, la véritable satisfaction de la saison tient néanmoins au rajeunissement des spectateurs de l’Opéra : notamment grâce aux billets à prix réduit, les acquéreurs de places individuelles (85% du public) sont dorénavant âgés en moyenne de 44 ans – contre 70 ans en moyenne pour le public abonné.

Popularité des œuvres de répertoire, curiosité pour les ouvrages contemporains

À quels spectacles ont-ils assisté ? La tête du classement réunit des œuvres de répertoire. À commencer par La Flûte Enchantée donnée en version anglaise au moment des fêtes de fin d’année, et qui a attiré « parents et grands-parents avec leurs petits enfants ». La production affiche un taux de remplissage de 87%. On y retrouve aussi les grandes productions incontournables (et très classiques) de Franco Zeffirelli : sa Turandot ayant rempli 82% de la salle new-yorkaise ou sa Bohème avec un taux de remplissage de 74%. La Carmen de la metteuse en scène Carrie Cracknell, qui a fait couler beaucoup d’encre outre-Atlantique, a manifestement aussi attiré le public (81% de remplissage) et on peut aussi y ajouter la reprise de Madame Butterfly qui marquait les débuts d’Asmik Grigorian sur la scène new-yorkaise (75% de remplissage).

Pour autant, les opéras contemporains ont aussi manifestement leur public. X: The Life and Times of Malcolm X, l’opéra militant d’Anthony Davis donné pour la première fois au Met Opera en novembre dernier affiche un taux de remplissage de 78%, alors que l'enchanteur Florencia en el Amazonas du compositeur Daniel Catán (le premier opéra en langue espagnole donné au Met) a rempli la salle à 68%. Les reprises de Fire Shut up in My Bones, puis de Dead Man Walking et de The Hours affichent des taux de remplissage respectifs de 65%, 62% et 61%. La fréquentation d’El Niño de John Adams n’atteint que 58% de la capacité de la salle new-yorkaise.

Chacun jugera du niveau d’engouement que ces œuvres suscitent auprès du public new-yorkais, mais Peter Gelb se dit « convaincu d’être sur la bonne voie en ce qui concerne la répartition entre les grands classiques intemporels et nouveaux opéras ». Il poursuit : « c’est la seule façon pour l'art de progresser, et nous devons expérimenter, tout ne sera pas aussi réussi que nous le souhaiterions ». Toujours est-il que sur les 84 934 nouveaux spectateurs du Met Opera au cours de la saison 2023-24 (contre 75 930 en 2022-23), environ 25% sont venus assister à l’une des six productions d’opéra contemporain données cette saison. Et sur cette cohorte, environ 10% sont revenus au Met pour voir un autre opéra. S’il est encore minoritaire, le public de l’opéra contemporain existe manifestement bel et bien – au moins à New York.

publié le 20 juin 2024 à 13h26 par Aurelien Pfeffer

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