Alors qu'il triomphe actuellement dans le rôle-titre du Barbier de Séville au Festival de Pesaro, Florian Sempey nous a accordé quelques instants, entre deux séries de représentations. L'occasion – pour ceux qui ne le connaissent pas encore – de se familiariser un peu avec LE baryton français qui monte...
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OOL : Vous incarnez actuellement le rôle-titre du Barbier de Séville au Festival de Pesaro. Est-ce la première fois que vous chantez ce personnage ?
Florian Sempey : J’ai déjà eu l’occasion de chanter Figaro à deux reprises en France, en 2012 à l’Opéra de Bordeaux, puis en 2013 à l’Opéra-Théâtre de Saint-Etienne, sous la direction d’Alberto Zedda. Après notre collaboration, il a souhaité me proposer ce rôle pour le ROF (ndlr : Rossini Opera Festival) de Pesaro. Cela a été une très grande émotion et un honneur de venir chanter Rossini dans sa ville natale, surtout quand on est le seul étranger de toute la production !
Qu'aimez-vous dans le rôle ?
TOUT ! Le rôle est vocalement parfait pour ma tessiture et mes capacités actuelles. Il m’a donné beaucoup de fil à retordre quand j’ai commencé à l’apprendre musicalement. La musique buffa de Rossini n’a rien de simple et exige l’apprentissage de certains paramètres comme le chant syllabique que je ne connaissais pas avant d’aborder ce répertoire. J’aime la vivacité d’esprit de ce personnage, sa joie de vivre, la finesse de ses comportements, très différents selon les protagonistes avec lesquels il chante. Une mine d’or vocale et scénique pour le passionné que je suis.
Comment le travail s'organise t-il avec l'équipe retenue - issue de l'Académie des Beaux-arts d'Urbino - pour mettre en scène le spectacle ?
Les intervenants de la Scuola di scenografia ont fait un travail de préparation remarquable. Avec un temps de répétition très court, nous avons fait un grand travail d’équipe. Ils ont eux-mêmes réalisé tous les éléments composant la scénographie dont une pièce magnifique représentant une réduction du Teatro Rossini dans les moindres détails ! Un travail de grande précision autant du point de vue des décors qu’au point de vue scénique. Une très belle production avec un jeu de scène dépassant les frontières du plateau pour s’incruster au sein même des spectateurs.
Depuis le début des années 80, le Festival de Pesaro a accueilli quelques-uns des plus grands chanteurs, chanteurs émérites du répertoire rossinien, tels que Marilyn Horne, Samuel Ramey, June Anderson, Rocwell Blake ou, plus proches de nous, Juan Diego Florez, Daniella Barcellona ou encore Olga Peretyatko... Cela crée-t-il un encouragement ou une appréhension ?
Il est vrai que s’inscrire dans cette grande tradition de chanteurs rossiniens est un honneur et une grande responsabilité. Se voir proposer un rôle sur la scène de Pesaro implique d’arriver le plus prêt possible avec la volonté de satisfaire pleinement le public ainsi que cette « mémoire » qu’est la grande tradition du ROF. Je tiens donc à remercier avec force le Maestro Alberto Zedda pour sa confiance et sa passion communicative.
Votre nomination aux Victoires de la Musique Classique l'an passé a t-elle eu un impact sur votre carrière ?
J’ai vraiment été très heureux d’être nommé aux Victoires de la Musique Classique 2013, ça a été une belle expérience, qui plus est entouré de collègues que je retrouve avec bonheur régulièrement sur scène. Il est vrai qu’un concert télévisé expose au grand public et permet de rendre notre art plus abordable aux
personnes qui ne sont pas particulièrement des aficionados. L’impact sur ma carrière a été minime, mais grâce à mon agent et à la confiance que l’on me porte, mon agenda était déjà rempli et le sera, je l’espère, longtemps encore.
Une de vos caractéristiques, c'est que l'on vous sent très à l'aise sur scène ?
J’aime les planches depuis toujours, j’aime le spectacle, j’aime transmettre des émotions tout simplement parce que j’aime partager. Oui beaucoup de personnes soulignent chez moi ce trait artistique du comédien et cela me conforte dans mon chemin. Je fais mon métier avec passion et je suis heureux que cela se voie, que cela se sente.
Quels sont les autres personnages d'opéra qui vous intéressent particulièrement, et pourquoi ?
J’ai beaucoup de tendresse pour la candeur de Papageno dans La Flûte enchantée, et j'ai également très envie de pouvoir chanter le rôle de Nabucco, en espérant en avoir un jour le charisme. La cruauté et la difficulté de la partition du rôle de Pizzarro m’intéressent aussi, mais ne seront pas abordables pour moi avant une quinzaine d’années ! Il me tarde, en revanche, de chanter mon premier Guglielmo dans Cosi fan tutte, ainsi que mon premier Malatesta dans Don Pasquale !
Après Pesaro, quels sont vos projets ?
En septembre, je retrouve avec bonheur l’Opéra National de Paris pour le rôle du Marquis d’Obigny dans La Traviata, puis à nouveau Le Barbier de Séville, dans la production de Damiano Michieletto que j’ai déjà abordée à Saint-Etienne. En décembre, je serai à l’Opéra Comique pour une nouvelle production de La Chauve-souris sous la baguette de Marc Minkowski, aux côtés de Sabine Devieilhe et Stéphane Degout. Je retrouverai Marc en février 2015, à la toute nouvelle Philharmonie de Paris, pour un concert de répertoire français avant d’aborder avec lui, au mois de mars, les splendides Lieder einer fahrenden gesellen de Gustav Mahler à la Halle aux grains de Toulouse. Ma saison se poursuivra dans mon cher Opéra National de Bordeaux où je retrouverai l’Ensemble Pygmalion et son chef Raphaël Pichon pour une nouvelle production de Dardanus, mis en scène par Michel Fau, avec qui j’ai fait Ciboulette en décembre dernier à Saint-Etienne. Il y a aussi, bien entendu, d’autres très beaux projets pour les saisons à venir, mais je ne peux malheureusement pas encore en parler !
Propos recueillis à Pesaro par Emmanuel Andrieu
Florian Sempey dans le rôle de Figaro du Barbier de Séville de Rossini au Festival de Pesaro - jusqu'au 20 août 2014
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