Quand les Jeux Olympiques riment avec art lyrique

Xl_jo_2024 © France 2

C’était l’événement du weekend, l’incontournable actualité qui habite encore ce début de semaine et qui s’inscrit désormais dans l’Histoire de France et des Jeux Olympiques. Il s’agit bien sûr de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques qui, pour la première fois, se tenait hors d’un stade pour faire de la ville entière sa scène. Une scène qui mettait à l’honneur la France et Paris, son Histoire, son architecture mais aussi l’ensemble de ses arts : artisanat, théâtre, cinéma, littérature, danse... mais aussi l’art lyrique.

Sport et musique font-ils bon ménage ? Manifestement oui. Les deux disciplines partagent en tout cas des enjeux et un vocabulaire communs (sportifs et musiciens cultivent une même attention au rythme, au mouvement ou au souffle, par exemple), nombre de sportifs s’entrainent en musique et presque autant de musiciens prêtent une attention particulière à leur condition physique. La grande musique est aussi omniprésente dans les grands rendez-vous sportifs – Placido Domingo, Jonas Kaufmann ou Aida Garifullina ont par exemple chanté pour diverses Coupes du monde et compétitions de football, Renée Fleming pour le Super Bowl aux Etats-Unis, et les cérémonies d’ouverture des Jeux Olympiques ont aussi régulièrement accueilli des interprètes lyriques – à commencer par Sumi Jo aux Jeux Olympiques de Séoul en 1988, Sydney en 2000, Pékin en 2008 ou Sotchi en 2014. 

Les Jeux Olympiques de Paris 2024 ne dérogent pas à la règle : dès avril dernier, c’était la mezzo-soprano Joyce DiDonato qui interprétait l’Hymne olympique lors de la cérémonie d'allumage de la flamme et dès l’origine, ces JO 2024 de Paris ont affiché l’ambition d’associer sport et culture – notamment en intégrant les Olympiades culturelles aux Jeux Olympiques. Une double approche réaffirmée à l'occasion de la Cérémonie d'ouverture des Jeux Olympiques de Paris.

Un choix dans la lignée de l’architecte de la cérémonie

Il faut dire qu’en choisissant le metteur en scène Thomas Jolly comme maître de cérémonie, l'événement ne pouvait pas oublier l’art du théâtre – dont il est issu – mais aussi l’art lyrique dans lequel le nom du metteur en scène s’épanouit depuis déjà quelques années. De son Fidelio pour la réouverture de l’Opéra-Comique en 2017 (plusieurs fois repris depuis), à son sublime Roméo et Juliette dernièrement à l’Opéra de Paris, l’homme de théâtre ne cesse d’offrir une vision personnelle et est désormais bien implanté dans le paysage lyrique. On retrouvait d'ailleurs Offenbach en début de soirée vendredi avec le célébrissime French Cancan que le monde nous envie. Un peu après, c’était au danseur étoile Guillaume Diopparrain de la dernière édition de « Tous à l’Opéra ! » – d’offrir sa grâce sur les toits de Paris.

Marina Viotti et Jakub Józef Orliński pour cette cérémonie d’ouverture

Parmi les nombreux artistes qui se sont retrouvés lors de cette soirée étalée sur quatre heures environ, les amateurs d’opéras ont pu reconnaître au moins deux artistes que l’on entend régulièrement sur les scènes lyriques.

D'abord la mezzo-soprano Marina Viotti, ici en duo avec le groupe métal français Gojira. Si sa voix avait du mal à percer à travers la musique métaleuse dans cet extérieur et ces conditions particulières, on ne peut qu’apprécier le clin d’œil à sa carrière. En effet, avant d’être la mezzo-soprano que l’on connait, auréolée des prix de « Meilleure jeune chanteuse de l’année » aux International Opera Award de 2019 ou celui d’artiste lyrique aux Victoires de la musique en 2023, la jeune femme interprétait du métal. L’accalmie de la fin de tableau lui a permis de rendre hommage à la Carmen de Bizet depuis la nef de la Liberté devant la Conciergerie, avant que le lieu ne s'enflamme à grands coups de pyrotechnie.

Puis nous avons pu apercevoir quelques rapides pas de breakdance de la part du contre-ténor Jakub Józef Orliński sur la Seine (selon Thomas Jolly, la danse fait le lien entre l'art et le sport), avant qu’il n’entame quelques minutes plus tard « Viens Hymen » pour le tableau en hommage aux sports urbains. Ainsi, de L’Olimpiade de Vivaldi au Théâtre des Champs-Elysées aux Jeux Olympiques au cœur de Paris, il n’y a eu finalement qu’un pas pour ces deux artistes présents dans la production donnée en juin.

Une jeune mezzo-soprano qui a attiré l’attention du public

Dernier nom qui a attiré toutes les curiosités des spectateurs et téléspectateurs : celui de la jeune mezzo-soprano Axelle Saint-Cirel qui a eu la lourde mission d’interpréter l’Hymne national français, vêtue des couleurs du drapeau depuis le toit du Grand Palais. Tout le monde s’accorde sur la forte émotion qui s’est dégagée de cet instant, mais nombreux sont celles et ceux qui se sont interrogés sur l’identité de la jeune cantatrice, encore peu connue du public.

Âgée de 28 ans, Axelle Saint-Cirel est née en région parisienne avant de partir en Malaisie, où elle a passé une partie de son enfance avant de revenir en France et d’entrer au conservatoire de Montbéliard. Puis, en 2017, elle intégrait le Pôle Supérieur de Boulogne-Billancourt et enfin le conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris deux ans plus tard.

Elle remportait la cinquième édition du Concours Voix des Outre-mer qui s’est tenue à l'Opéra de Paris en 2023. Elle a notamment tenu le rôle-titre de la Carmen intime à Avignon en février dernier et interprètera le rôle de la Maman dans L’Enfant et les Sortilèges à l’Opéra de Monte-Carlo en mars 2025. Nul doute que sa participation très remarquée à la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Paris cette année – qu’elle avait tenue secrète y compris auprès de sa famille ! – saura être un tremplin pour sa jeune carrière.

Que l’on apprécie ou non le travail général de Thomas Jolly durant cette soirée, on ne peut qu’être heureux de l’avoir mise en avant, même ponctuellement durant cette très longue cérémonie d’ouverture, lors d’un événement majeure, regardé tout autour du globe à une heure de grande écoute, alors que les regards du monde entier étaient braqués vers la capitale et ce grand spectacle.

Elodie Martinez

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