Quels sont les opéras à ne pas rater au cours de ce mois de décembre 2024 ? Assurément l’incontournable ouverture de la saison lyrique de La Scala de Milan (retransmise en ligne), mais aussi une création mondiale à la Monnaie de Bruxelles, une rareté à redécouvrir à l’Opéra de Limoges, un anniversaire à l'Opéra-Comique, une nouvelle production à l'Opéra national de Lorraine qui s’annonce savoureuse et toujours des distributions alléchantes. Tour d’horizon subjectif et non exhaustif.
Fanny and Alexander au Théâtre Royal de la Monnaie, du 1er au 19 décembre
Création mondiale. En 1982, Ingmar Bergman réalisait Fanny et Alexandre, un « film de Noël » aux allures de tragédie familiale semi-autobiographique. Le long-métrage fait aujourd’hui l’objet d’une adaptation opératique que Peter de Caluwe (commanditaire de l’ouvrage pour la Monnaie de Bruxelles) a confié au compositeur suédois Mikael Karlsson et au librettiste Royce Vavrek. Dans leur opéra Fanny et Alexander, ils restituent la sombre trame du film : suite à la mort brutale de leur père, Fanny et Alexandre voient leur mère se remarier avec l’autoritaire évêque Edvard Vergérus qui entend discipliner les enfants.
Pour cette création mondiale, Mikael Karlsson signe une « partition qui allie musique symphonique et sonorités électroniques surround ingénieuses », alors que la mise en scène est confiée à Ivo Van Hove : il « plonge au plus profond de l’âme de ses personnages pour créer (...) des tableaux qui se transforment peu à peu en un effrayant palais des glaces, un monde imaginaire qui conteste la dure réalité ». Sur scène, Thomas Hampson interprète l’évêque, notamment face à Anne Sofie von Otter. Assurément, une nouvelle œuvre à découvrir.
Fanny and Alexander, Monnaie de Bruxelles (2024) © Baus
La Force du destin à la Scala de Milan, du 7 décembre au 2 janvier
Evénement. C’est un événement lyrique chaque 7 décembre : La Scala de Milan ouvre sa saison lyrique avec une nouvelle production défendue par une distribution d’exception. Cette année, la maison scaligère a opté pour La Force du destin, dans une mise en scène de Leo Muscato. Selon le metteur en scène, la guerre est omniprésente tout au long des quatre actes de l’opéra de Verdi, elle devait donc être au cœur de sa production. Pour autant, pour ne pas risquer de banaliser l’horreur des conflits armés dans le contexte actuel, Leo Muscato opte pour vision quasi-symbolique de la guerre telle qu’elle existe depuis deux siècles : en esquissant une guerre spécifique dans chacun des actes de l’opéra, le metteur en scène dépeint quatre mondes et quatre façons totalement différentes de concevoir les guerres. Leo Muscato s’attelle ainsi à raconter le livret de La Force du destin comme « un long plan séquence », dans une scénographie en perpétuelle évolution qui prend des allures de « roue du destin qui tourne inexorablement » sur la scène tout au long de l’opéra (manifestement sur une scène rotative).
Et pour défendre cette vision de l’œuvre de Verdi, La Scala réunit une distribution d’envergure : Anna Netrebko en Donna Leonora, Brian Jagde en Don Alvaro (en lieu et place de Jonas Kaufmann initialement annoncé) ou encore Ludovic Tézier en Don Carlo di Vargas.
La production milanaise affiche complet depis longtemps, mais la production fait l’objet d’une captation vidéo et sera retransmise, notamment en France sur Arte et Arte Concert.
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Les Fêtes d'Hébé à l'Opéra-Comique, du 13 au 21 décembre
Baroque. Ce 19 décembre, William Christie fêtera ses 80 ans... à l’Opéra-Comique. Le chef d’orchestre y retrouvera son ensemble Les Arts Florissants pour diriger Les Fêtes d’Hébé ou Les Talents Lyriques de Rameau, dans une nouvelle production de Robert Carsen. Et le duo sera bien entouré, par une distribution de spécialistes de musique baroque emmenée notamment par Emmanuelle de Negri, Lea Desandre ou encore Ana Vieira Leite.
Au-delà de l’équipe artistique de la production et de l’anniversaire du chef d’orchestre, l’ouvrage lui-même a de quoi susciter la curiosité : Les Fêtes d’Hébé n’est sans doute pas l’opéra de Rameau le plus fréquemment donné sur scène, alors même que l’œuvre est l’une des références de l’opéra-ballet français du XVIIIe siècle – ces ouvrages conçus pour être spectaculaires et impressionner le public grâce à des effets de machineries, en mêlant danse et musique, dans des décors et costumes fastueux. Musicalement, ces Fêtes d’Hébé devraient valoir le déplacement. Scéniquement, on sait Robert Carsen plutôt amateur de scénographies sobres et minimalistes, on sera dès lors curieux de découvrir comment il entend se saisir de l’envergure de l’œuvre.
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La Cenerentola à l’Opéra national de Lorraine, du 13 au 22 décembre
Répertoire. Les périodes de fêtes de fin d’année sont propices aux réjouissances et pour donner le ton, l’Opéra national de Lorraine programme La Cenerentola de Rossini. On le sait, l’ouvrage est librement inspiré de la Cendrillon des contes de Perrault, mais s’affranchit ici de toute dimension magique – si ce n’est dans la musique, confiée ici à la direction du vibrionnant Giulio Cilona ! Le metteur en scène de cette nouvelle production, Fabrice Murgia, est féru d’intégrations vidéo dans son travail scénique et pour sa production nancéienne, il entend jouer avec les codes du film de genre. Il propose une lecture moderne de cette Cendrillon, qui trouve son inspiration dans le cinéma burlesque et gothique, notamment de Tim Burton – avec une Cendrillon qui pourrait rappeler Mercredi Addams. Gageons que cette Cenerentola de fin d’année pourrait être savoureuse.
Pour lui donner corps sur scène, le rôle-titre est confié à la mezzo écossaise Beth Taylor, qui tiendra tête au Don Magnifico de Gyula Nagy ou aux deux sœurs campées par Héloïse Poulet et Alix Le Saux, afin de mieux conquérir le cœur du prince Dandini d’Alessio Arduini.
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Maquette des décors, Opéra National de Lorraine (2024) (c) Vincent Lemaire
Martha à l’Opéra de Limoges, le 31 décembre
Rareté / redécouverte. Pour la fin d’année, l’Opéra de Limoges exhume une rareté, Martha, opéra romantique de Friedrich von Flotow – que les scènes lyriques ont progressivement oublié malgré un solide succès populaire dans la foulée de sa création en 1847. L'ouvrage repose sur un livret léger : pour tuer l’ennui, Lady Harriet et sa femme de chambre de Nancy se déguisent en servantes ; par jeu, elles se feront embaucher au service de riches fermiers, puis entre changements d’identités et jeux de conventions sociales, l’amour naîtra pour que les couples se forment.
L’ouvrage de Flotow se classe parmi ces opéras autant capables de divertir que d’émouvoir, dont les airs enlevés et entrainants ont su séduire le public avant que l’œuvre ne soit (injustement ?) considérée comme démodée. L’Opéra de Limoges en propose une version de concert, avec Athanasia Zöhrer et Victoire Bunel dans les rôles de Lady Harriet et Nancy, face à leurs prétendants Lyonel (Norman Reinhardt) et Plumkett (Anas Séguin, qui succède là à Enrico Caruso dont c’était l’un des rôles favoris), en plus du jeune et prometteur Pierre-Yves Cras en Sir Tristan. Une joyeuse curiosité à (re)découvrir au passage de l'année.
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Et aussi, ailleurs en Europe...
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À partir de ce 2 décembre et jusqu’au 21 février prochain, l’English National Opera donne le réjouissant Pirates of Penzance des trublions Gilbert et Sullivan – dont certains des airs et mélodies restent particulièrement populaires en Angleterre. L’ENO reprend la production de Mike Leigh et s’il lui manque peut-être un petit brin de folie, elle reste savoureuse.
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De son côté, le Gran Teatre del Liceu de Barcelone reprend Madame Butterfly du 8 au 28 décembre dans la mise en scène de Moshe Leiser et Patrice Caurier. La production est bien connue, notamment à Londres, mais profite ici d’une distribution emmenée par Sonya Yoncheva dont on ne se lasse pas en Cio-Cio-San – en alternance avec Saioa Hernández et Ailyn Pérez.
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Du 12 au 19 décembre, le Grand Théâtre de Genève propose Fedora, le thriller opératique d’Umberto Giordano. À la mise en scène, Arnaud Bernard qu’on saluait récemment pour sa triple Manon à Turin, et puis sur scène, Aleksandra Kurzak dans le rôle-titre aux côtés de Roberto Alagna.
- À Madrid, le Teatro Real propose une nouvelle production de Maria Stuarda du 14 au 30 décembre. Au-delà des mises en scène toujours impressionnantes de David McVicar, la distribution est prometteuse : Lisette Oropesa dans le rôle-titre face à la jeune et non moins impressionnante Aigul Akhmetshina en Elisabetta.
publié le 29 novembre 2024 à 08h37 par La rédaction
29 novembre 2024 | Imprimer
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