En prenant ses fonctions à la tête de l’Opéra de Vienne, Bogdan Roščić entendait œuvrer pour renouveler le répertoire et le public de la vénérable institution viennoise. Sa saison 2024/25 « comble les lacunes » avec des œuvres qui n’étaient plus données depuis longtemps à Vienne ou en renouvelant des productions jugées vieillissantes – et comme toujours défendues par des distributions superlatives. Tour d’horizon.
Le mandat de Bogdan Roščić à la tête de l’Opéra d'Etat de Vienne court jusqu’en 2030 et le directeur entend manifestement inscrire son action dans la durée. Pour la première fois en 2024/2025, la maison viennoise proposera ainsi une double saison à ses spectateurs : l’une destinée aux plus jeunes afin de contribuer à renouveler le public ; l’autre adressée aux spectateurs plus traditionnels de l’Opéra et visant cette fois à renouveler le répertoire de l’établissement – et manifestement, le public viennois adhère à cette stratégie, Bogdan Roščić revendique un taux d'occupation de 99,94%, et même de 100% en décembre dernier, un record pour la maison.
Lors de sa prise de fonction, on se souvient que Bogdan Roščić avait indiqué son intention de renouveler rapidement le répertoire de la maison viennoise en programmant des œuvres parfois délaissées depuis longtemps ou en remplaçant des productions emblématiques (mais parfois vieillissantes). Quelques « grands chefs-d'œuvre de premier plan » sont « encore manquants » au répertoire, mais la saison 2024/25 dévoilée ce weekend a vocation à combler certains de ces manques – en attendant de poursuivre cette action les saisons suivantes, notamment avec une nouvelle Tétralogie à partir de 2026.
Audace de mise en scène et valeurs sûres musicales ?
Six nouvelles productions « d’ouvrages de premier plan » sont ainsi annoncées pour la saison 2024/25 de l’Opéra de Vienne, qui s’ouvrira le 26 septembre prochain avec la version italienne de Don Carlo. Bogdan Roščić en confie la mise en scène à Kirill Serebrennikov, après son Parsifal controversé. Comme pour contrebalancer l’audace de la mise en scène, la production repose musicalement sur l'aguerri directeur musical Philippe Jordan et sera marquée par la prise de rôle d’Asmik Grigorian en Elisabeth.
Même stratégie manifestement avec Tannhäuser (à partir du 22 mai 2025) : Bogdan Roščić confie sa première mise en scène à Vienne à Lydia Steier, accompagné de nouveau par Philippe Jordan. Sur scène, le choix audacieux de Clay Hilley pour endosser le rôle-titre aux côtés notamment de Malin Byström en Elisabeth et Ludovic Tézier en Wolfram.
Tout aussi notable, le directeur annonce une nouvelle production de La Flûte Enchantée à partir du 27 janvier 2025, confiée à la jeune metteuse en scène Barbora Horáková Joly qui entend en faire un « vrai spectacle ». Là encore, la direction musicale pourrait rassurer le public, confiée à Franz Welser-Möst – ce sera néanmoins la première fois qu’il dirigera l’opéra de Mozart à l’Opéra d’Etat. Sur scène, l'enthousiasmant Julian Prégardien interprétera Tamino aux côtés de la Pamina de Slávka Zámečníková, mais aussi de Serena Sáenz Molinero en Reine de la nuit, Georg Zeppenfeld en Sarastro ou Ludwig Mittelhammer en Papageno.
Raretés à Vienne
Pour « combler les lacunes » de l’Opéra de Vienne, Bogdan Roščić annonce aussi une nouvelle production de Norma, à partir du 22 février 2025 – ouvrage qui n’avait plus été donné en version scénique dans l’établissement depuis 1980. La production est ici confiée à Cyril Teste et Michele Mariotti, avec sur scène Federica Lombardi pour ses débuts dans le rôle de Norma et Juan Diego Flórez en Pollione.
Autre rareté à Vienne avec Iolanta de Tchaïkovski dont les dernières représentations remontent apparemment à plus d’un siècle, sous l’ère de Gustav Mahler. L’ouvrage reviendra néanmoins à Vienne à partir du 24 mars 2025, avec Tugan Sokhiev au pupitre, dans une nouvelle production d’Evgeny Titov. La soprano bulgare Sonya Yoncheva chantera le rôle-titre, dans lequel elle fait sensation – comme par exemple à Paris en 2016.
Mentionnons enfin la petite incursion de l’Opéra de Vienne dans le répertoire contemporain avec une nouvelle production de Fin de Partie de György Kurtág, donnée à partir du 16 octobre prochain, dans une mise en scène de Herbert Fritsch « pour que l’humour ne soit pas négligé ». Et si le compositeur (du haut de ses 98 ans !) est impliqué dans le projet, c’est Simone Young qui doit en assurer la direction musicale.
Et une quarantaine de reprises
Très classiquement, les nouvelles productions de l’Opéra de Vienne s’accompagnent de très nombreuses reprises (près d'une quarantaine), souvent défendues par des distributions d’exception.
On peut mentionner, en vrac, Carmen avec Aigul Akhmetshina et Vittorio Grigolo ; La Traviata avec Lisette Oropesa, Juan Diego Flórez et Ludovic Tézier ; mais aussi Roméo et Juliette avec Nadine Sierra et Saimir Pirgu ou Aida Garifullina et Benjamin Bernheim ; Macbeth avec Gerald Finley et Ekaterina Semenchuk ; Billy Budd avec Huw Montague Rendall et Gregory Kunde ou Madame Butterfly avec Marina Rebeka mais aussi Tosca réunissant en alternance Lise Davidsen, Sonya Yoncheva et Aleksandra Kurzak face à Freddie De Tommaso, Piotr Beczala et Roberto Alagna.
Citons encore Cavalleria rusticana et Pagliacci avec Elina Garanca et Jonas Kaufmann, Ariane à Naxos avec Anna Netrebko et Michael Spyres, suivi de La Dame de pique où l’on retrouvera Anna Netrebko (une prise de rôle initialement prévue à New York avant qu'elle ne soit annulée par Peter Gelb et qu'on retrouve donc à Vienne) avec cette fois Yusif Eyvazov, ou encore Lohengrin dirigé par Christian Thielemann et la Tétralogie de Wagner mise en scène par Sven-Eric Bechtolf avec Andreas Schager, Anja Kampe ou encore Lise Davidsen – entre autres. Chacun devrait aisément y trouver son compte.
Le détail de la saison est disponible sur le site de l’Opéra d’Etat de Vienne.
publié le 29 avril 2024 à 15h22 par Aurelien Pfeffer
29 avril 2024 | Imprimer
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