Ces opéras à ne pas rater en octobre

Xl_opera-a-voir-en-octobre-2024 © OOL

Plusieurs maisons d’opéra ont déjà inauguré leur saison 2024/25 et commencent à accueillir de nouveau le public ou sont sur le point de le faire. L’offre lyrique est riche, mais quels sont les opéras qui méritent sans doute une certaine attention au cours de ce mois d’octobre 2024 ? Sélection subjective et non exhaustive d’œuvres de répertoire ou d’opéras contemporains, de blockbusters opératiques ou d’ouvrages rares et autres curiosités, à voir en salle ou au cinéma.

Wozzeck à l’Opéra de Lyon, du 2 au 14 octobre

L’Opéra national de Lyon lance sa saison lyrique ce 2 octobre avec Wozzeck dans une nouvelle production du metteur en scène Richard Brunel, également directeur de l’établissement depuis 2021. Profondément désespéré, l’opéra d’Alban Berg met en musique le drame de la soumission et l’aliénation de l’individu à la société la plus cruelle. Pour représenter ce drame sur la scène lyonnaise, Richard Brunel imagine un dispositif « inspiré de l’univers mensonger du film The Truman Show », dans lequel les solistes seront amenés à interagir sur scène avec un robot : un bras articulé projetant un faisceau lumineux, à l’allure tantôt de monstre froid et déshumanisé, tantôt de créature poétique, donne le sentiment de scruter sans cesse le soldat Wozzeck. Selon l’Opéra de Lyon, c’est la première fois qu’un tel robot est utilisé dans une production d’opéra.

Ici, pour (presque) donner la réplique à ce robot, une distribution de haut vol est réunie sur scène : le baryton Stéphane Degout dans le rôle-titre (auquel il prêtait déjà toute sa délicatesse en 2021 au Capitole de Toulouse), aux côtés notamment la soprano canadienne Ambur Braid dans le rôle de Marie, que le public lyonnais avait déjà pu découvrir l’année dernière dans La Femme sans ombre.

Il Piccolo Marat à Anger Nantes Opéra, du 2 au 5 octobre

On l’évoquait récemment dans nos colonnes : du 2 au 5 octobre, Angers Nantes Opéra invite à redécouvrir Il Piccolo Marat, rareté du compositeur Pietro Mascagni (que l’on connait surtout pour avoir signé Cavalleria Rusticana). Ce petit Marat se révèle particulièrement brutal : le livret de l’opéra puise son inspiration dans les « noyades de Nantes », épisode sombre de la Terreur survenu entre novembre 1793 et février 1794, au cours duquel des centaines d’aristocrates et membres du clergé ont été noyés dans la Loire. Pietro Mascagni en tire un opéra puissant et révolté.

À Nantes puis à Angers, la direction musicale est confiée au chef Mario Menicagli, dans une mise en espace de Sarah Schinasi. Sur scène, la maison angevine réunit une distribution très italienne emmenée par Samuele Simoncini dans le rôle-titre et Rachele Barchi pour ses débuts en France, aux côtés notamment de l'imposant Andrea Silvestrelli.

Héroïne à l’Opéra national de Lorraine, du 6 au 12 octobre

Autre (triple) rareté avec le projet « Héroïne », du 6 au 12 octobre à l’Opéra national de Lorraine. Le temps d’une même production, l’institution réunit trois ouvrages courts et rares, qu’ils aient été oubliés ou mis à l’index volontairement. L’institution programme ainsi le sulfureux Sancta Susanna, opéra « miniature » de Paul Hindemith traitant du plaisir et du désir dans la vie d’un couvent, ayant régulièrement fait scandale les rares fois où l’opéra a été donné depuis sa création en 1922. La production se prolonge avec l’inquiétant Château de Barbe-Bleue de Bartók, plus courramment donné, avant de se conclure avec une œuvre quasi-inconnue, La Danse des morts d’Arthur Honegger, composée sur un poème de Claudel – dans un enfer exubérant, cette danse macabre met en scène des morts devenant « une communauté joyeuse et subversive ».

À Nancy, le metteur en scène Anthony Almeida associe les trois ouvrages pour retracer la vie d’une femme (l'héroïne du titre) à trois âges, chaque œuvre figurant un rituel social qui rythment son existence (le baptême, le mariage puis le trépas). Sur scène, les trois œuvres sont interprétées par une jeune distribution réunissant notamment par Anaïk Morel et Apolline Raï-Westphal ou Joshua Bloom et Rosie Aldridge. L'occasion de (re)découvrir des curiosités de la première moitié du XXe siècle. 

Didon et Énée à l’Opéra Royal de Versailles du 18 au 20 octobre

En ce début de saison, l’Opéra Royal de Versailles fait la part belle à la musique baroque : l’institution propose Didon et Énée dans la mise en scène enchanteresse de Cécile Roussat et Julien Lubek (de la compagnie Les Âmes Nocturnes). Invoquant les arts du cirque et l’école du Mime Marceau, l’imaginaire fantastique et la poésie sont au rendez d’une proposition visuelle foisonnante dans une production défendue par une multitude de danseurs et danseuses, trapézistes et autres contorsionnistes aux allures de créatures monstrueuses... qui savent néanmoins s’effacer devant la musique de Purcell.

Et c’est heureux. La production accueille notamment Sonya Yoncheva, qui renoue ici avec la musique baroque de ses premières amours. La soprano bulgare partage la scène avec les jeunes solistes de l’Académie de l’Opéra Royal parmi lesquels Halidou Nombre en Énée, Sarah Charles en Belinda ou encore Attila Varga-Tóth et Pauline Gaillard en sorcières.

Les contes d’Hoffmann au Metropolitan Opera de New York (au cinéma le 5 octobre)

Notons enfin Les contes d'Hoffmann du Metropolitan Opera de New York. La production de Bartlett Sher a déjà été donnée à plusieurs reprises depuis sa création en 2009 : elle est à la fois pétillante et colorée, tout en étant lisible pour le spectateur, malgré l’intrigue un brin alambiquée du livret. Cette reprise vaut néanmoins surtout pour sa distribution, à commencer par Benjamin Bernheim dans le rôle-titre : Hoffmann s’impose comme l’un des grands rôles du ténor franco-suisse, qu’il vient d’interpréter avec succès à Salzbourg, après Paris l’année dernière suscitant le même enthousiasme. Et il est plutôt bien entouré : Erin Morley dans le rôle de l’automate Olympia, Pretty Yende dans celui de la diva Antonia et Clémentine Margaine pour interpréter la séductrice Giulietta, en plus de Vasilisa Berzhanskaya en Nicklausse (qui joue un rôle central dans la production).

À défaut de faire le déplacement à New York, la représentation de ce 5 octobre fait l’objet d’une captation vidéo, retransmise en direct dans les cinémas à travers le monde – et notamment en France dans le réseau Pathé.

Mais aussi...

  • L’Opéra d’Etat de Vienne ouvre sa saison lyrique avec une nouvelle production de Don Carlo mise en scène par Kirill Serebrennikov – qui transpose l’ouvrage à notre époque, dans une sorte d’usine de textile tout en habillant certains de ses protagonistes de tenues d’époque très corsetées pour illustrer la rigueur de la cour d’Espagne. Si les solistes (notamment la prise de rôle d'Asmik Grigorian en Elisabeth) et la direction musicale étaient salués par le public viennois le soir de la première, la mise en scène était abondamment huée – au point que le chef Philippe Jordan finisse par agiter son mouchoir blanc au bout de sa baguette avant le quatrième acte, en signe de reddition, de sorte pouvoir reprendre la représentation. Pour se forger sa propre idée, la production est diffusée par Arte Concert jusqu'au 28 décembre (expurgée néanmoins de la plupart des sifflets du public).
  • Manon est un personnage d’opéra(s) incontournable. Tout au long de ce mois d'octobre, le Teatro Regio de Turin a la bonne idée de programmer une trilogie de Manon (la Manon de Massenet, la Manon Lescaut de Puccini et la plus rare Manon Lescaut d’Auber) de telle sorte que le public curieux pourra assister aux trois opéras le temps d’un weekend. Trois lectures d’un même personnage par le metteur en scène Arnaud Bernard, mêlant grands classiques et curiosités.
    » Lire également : Entretien avec Mathieu Jouvin, directeur de l’Opéra de Turin

  • Du 10 au 24 octobre sur la scène du Linbury Theatre, le Royal Ballet and Opera de Londres rend hommage à Leonard Bernstein avec le diptyque Trouble in Tahiti et A Quiet Place. Pour l’occasion, Oliver Mears signe une nouvelle mise en scène réunissant les deux œuvres : l’histoire débute dans Trouble in Tahiti avec le jeune couple Sam et Dinah qui fait face à l’illusion du bonheur et se poursuit dans A Quiet Place 30 ans plus tard, alors que Dinah vient de mourir dans un accident de voiture. Le public londonien découvrira pour la première fois Henry Neill et Wallis Giunta sur scène. 

  • Notons enfin La Fille du Régiment de Donizetti, donnée à l’Opéra de Paris à partir du 17 octobre sous la battue d’Evelino Pidò. Alors certes, la production de Laurent Pelly a déjà été vue et revue à de nombreuses reprises et sur moult scènes. La production réunit néanmoins une belle distribution : Julie Fuchs d’abord, qui retrouve le rôle de Marie qu’elle a déjà chanté dans cette même production, mais aussi Susan Graham en Marquise de Berkenfield et Dame Felicity Lott en Duchesse de Crackentorp. Fichtre !

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